Brèves DZ #57 : Ravitaillement Marine nationale et italienne, nouveau SNA, Tirs Caesar en Ukraine, contrats Tigre MK3, Douanes, cyber-gendarmes, Danemark et Europe de la Défense
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[Marine nationale]
Depuis le 20 mai, la Méditerranée centrale est le théâtre d’un exercice de préparation opérationnelle interarmées et interalliée : MARE APERTO 22. Organisé autour du porte-aéronef italien Cavour, qui accueillera bientôt les nouveaux F-35B à décollage court et appontage vertical, près de 42 bâtiments dont 3 sous-marins, 22 aéronefs et plus de 4 000 militaires se sont retrouvés pour cette manoeuvre réunissant 7 nations membres de l’OTAN. Engagé au sein de la Task Force 705 la plus grande manœuvre amphibie annuelle de la marine italienne avait pour but de projeter une force de débarquement dans un environnement contesté et de contrôler un espace aéromaritime loin des ports d’attache dans un contexte de lutte multi-domaines.
À cette occasion, la frégate de défense aérienne Forbin, qui avait en charge le lead de la défense aérienne de l’exercice, a réalisé le 23 mai un premier ravitaillement à la mer de 250 m3 de gazole avec le nouveau bâtiment ravitailleur de flotte italienne Vulcano. Le LSS (Logistic Support Ship) de 193 mètres de long et 22 de large pour un déplacement de 20 000 tonnes, préfigure le futur bâtiment ravitailleur de force (BRF) Jacques Chevalier, actuellement en cours d’armement sur les chantiers de Saint-Nazaire. Le BRF sera admis au service actif début 2023 et deviendra le deuxième plus gros bâtiment de la Marine nationale derrière le porte-avions Charles de Gaulle.
[Marine nationale]
Le vendredi 3 juin, le nouveau ministre des Armées, M. Sébastien Lecornu s'est rendu sur la base navale de Brest pour la mise en service opérationnelle du nouveau sous-marin d’attaque (SNA) Suffren. Trois ans après sa mise à l’eau à Cherbourg, ce nouveau bâtiment de la classe Barracuda, qui en comptera six à terme, va prendre la mer prochainement. Destiné à remplacer la précédente classe de SNA, veille de près de 30 ans, le Suffren affiche une longueur de 99 mètres pour un diamètre de 8,8 mètres, un déplacement de 5 300 tonnes avec un équipage de 65 marins. Le SNA est capable de naviguer en totale autonomie pendant 70 jours et projetable sans assistance sur n’importe quel point du globe grâce à sa propulsion nucléaire. « Il illustre très clairement le renouvellement très attendu des forces sous-marines françaises, explique sur France Info, Vincent Groizeleau, le rédacteur en chef du site meretmarine.com. Ce sont les premiers sous-marins français capables de tirer des missiles de croisière MDCN (fabriqué par MBDA) sur une cible terrestre à plus de 1 000 km ». Les cinq autres bâtiments du programme Barracuda seront livrés petit à petit à la Marine nationale. Le prochain : le Dugay-Trouin sera mis à l’eau avant la fin de l’été pour une mise en service opérationnelle prévue courant 2023.
[Ukraine]
Nous en parlions il y a quelques semaines, les canons CAESAR livrés à l’Ukraine sont déjà entrés en action. Alors que les premières informations parlaient de 12 systèmes livrés, Joël Barre, le délégué général pour l’armement, a officiellement annoncé 6 véhicules fournis, lors d’une audition au Sénat le 4 mai dernier. Les forces de défense ukrainiennes ont publié dès le 24 mai de nombreuses photos du canon de 155mm français en action, pour au moins trois d’entre eux au sein de la 55e brigade d’artillerie. Sur les réseaux sociaux, les Ukrainiens annoncent la destruction de 2 chars, 2 blindés BMD et d’un véhicule de transport de munitions à une distance de 22 km. Point particulier et toujours selon les déclarations du DGA, les canons ont « dû être adaptés par Nexter pour être compatible avec les systèmes de commandement ukrainiens », ce qui laisse à penser, vu le temps de livraison très court, que ce don était prévu bien avant l’annonce du Président de la République le 22 avril dernier.
Contrairement à ce qui avait été annoncé, les 6 canons n’ont pas été prélevés dans les usines Nexter sur les véhicules prévus à l’export, mais bien sur les ressources de l’armée de Terre qui ne dispose plus aujourd'hui que de 70 canons. Les CAESAR français doivent êtres rénovés et/ou replacés au standard nouvelle génération (NG) d’ici 2031 pour atteindre un parc de 109 pièces.
[Industrie]
Malgré l’abandon (provisoire ?) du programme de modernisation du Tigre au standard MK3 par l’Allemagne, l’avancée des signatures de contrats suit son cours notamment entre la France et l’Espagne. Après Airbus Helicopters, Safran et MBDA, c’est au tour de l’industriel espagnol Indra Sistemas de rejoindre le programme de la nouvelle génération de l'hélicoptère d'attaque. Du côté français, l’entreprise Thales sera chargée de fournir le casque TopOwl DD et le système radio CONTACT permettant l’intégration des aéronefs de l’ALAT à la bulle Scorpion. Outre-Pyrénées l’entreprise espagnole Indra, spécialisée dans les systèmes informatiques de transport, de trafic aérien et de Défense et sécurité, fournira une modernisation du système IFF (reconnaissance ami/ennemis) ainsi qu’un système de communication de commandement et de contrôle (SpC2) uniquement destiné à la flotte espagnole.
Ces contrats sont signés avec l’organisation conjointe de coopération en matière d’armement (OCCAR) qui est chargée par la France et l’Espagne de piloter le programme MK3. D’un montant de 4 Md€, le marché notifié début mars comprend la rénovation de 60 machines (42 pour la France et 18 pour l’Espagne). Le retrait de l’Allemagne, s’il se confirme au profit des AH-64 Apaches de Boeing amputerait la France de près de 25 exemplaires.
[Douanes]
Jeudi 26 mai, le service Garde-Côtes des Douanes (SGCD) Manche mer du Nord Atlantique a saisi plus de 124 kilos de cocaïne cachés sous un cargo stationné dans la zone d’attente du port de La Rochelle. Les douaniers se trouvaient en mission de surveillance depuis deux jours lorsque l’officier de permanence du SGCD de Nantes a demandé à procéder au contrôle d’un cargo vraquier en provenance du Brésil et battant pavillon du Libéria. Lors de l’inspection à bord, les douaniers ont découvert des sangles sortant d’une cavité intégrée à la coque. Ne parvenant pas à ouvrir de l’extérieur, il a fallu l’intervention des plongeurs par 12 mètres de fond pour accéder à cet espace immergé et en extraire trois sacs conditionnés avec du Néoprène étanche et lestés par des disques de fonte. Trois plongées ont été nécessaires pour remonter les stupéfiants d’une valeur estimée à la revente de plus de 7,5 millions d’euros.
Quelques jours auparavant c’est près de 500 000 paquets de cigarettes de contrebande, soit 10 tonnes de marchandises illicites qui ont été saisies le 24 mai sur l’autoroute A6 au niveau de Lons-le-Saunier (Jura) dans un camion en provenance de Pologne. Le chargement était destiné à alimenter le marché de la région lyonnaise, très actif sur la contrebande de cigarettes. Le conducteur du poids lourd a été condamné à 15 mois d’emprisonnement et une amende de 5 millions d’euros soit la valeur marchande de la saisie.
[Gendarmerie nationale]
Un peu plus d’un an après sa création, le général Marc Boget a tenu une conférence de presse le 30 mai dernier, pour un premier bilan du commandement de la gendarmerie dans le cyberespace (ComCyberGend). Lancé en février 2021, ce nouveau service a de multiples objectifs : centraliser et coordonner les enquêtes des spécialistes cyber de la gendarmerie au niveau national et international, mais aussi sensibiliser et former les militaires à ce nouveau type de criminalité. Le premier bilan fait état de près de 2 500 enquêtes menées par les 6 500 cyber gendarmes répartis entre la métropole et l’outre-mer, « dans 70% des cas, l’arnaque en ligne reste la principale infraction relevée par nos officiers », explique le général. Côté prévention, la gendarmerie dispose d’une équipe de 35 personnes disponibles 24/24, 365 par an, prêtes à répondre aux questions des usagers, notamment pour les problèmes liés aux infractions sur le web.
Lors de cette présentation, le général Patrick Perrot, coordinateur national de la stratégie Intelligence artificielle (IA) de la Gendarmerie nationale, est revenu sur les dernières avancées technologiques en matière d’investigation et de prévention, notamment grâce à l’analyse prédictive de la délinquance. Considérée comme futuriste il y a encore quelques années, cette technique consiste, grâce à l’IA, à déterminer par des « points de chaleurs » des zones géographiques plus à même d’être touchées des cambriolages. « Nous n'utilisons aucune donnée à caractère personnelle et nous basons sur la temporalité des faits pour donner aux commandants de compagnies et de groupement de gendarmes un outil de contrôle », affirme le général Perrot. Et les résultats sont là ! En effet, sur près de 95 % des zones identifiées il « s’est passé quelque chose ».
Si le travail des forces de sécurité dans le monde cyber est devenu un pilier essentiel de la lutte contre la délinquance, la gendarmerie, comme beaucoup d’autres entités étatiques, se retrouve face à un immense défi : recruter. « Il manque 5 à 6 000 ingénieurs dans la cybersécurité, tout le monde s'arrache les ressources, avoue Marc Boget. Pour tenter d’y pallier nous augmentons de manière très importante la formation interne, nous avons créé un centre national de formation cyber à Lille et une académie interministérielle de la cyber pour des formations initiales et continues ».
[Danemark]
C’est une véritable petite révolution qui vient de se dérouler au Danemark. En effet, le mercredi 1er juin près de 67% des danois ont voté en faveur d’une intégration à la politique de défense européenne. « Ce soir, le Danemark a envoyé un signal important. À nos alliés en Europe et à l'OTAN, et au Président russe. Nous montrons que, quand Poutine envahit un pays libre et menace la stabilité en Europe, nous autres, nous nous rassemblons », a déclaré la Première ministre danoise Mette Frederiksen. Bien que membre de l’UE depuis 1973, le pays a été à plusieurs reprises en marge de la communauté, en rejetant le traité de Maastricht en 1992 tout d'abord, mais en restant aussi hors de la zone euro et en rejetant les politiques en matière de justice, d’affaires intérieures et de défense. Bien que membre fondateur de l’OTAN, cette position a banni, à l’époque, le pays de toute mission sous la bannière européenne. L’invasion de l’Ukraine a manifestement changé la donne. Deux semaines après le passage de la frontière par les troupes russes, la Première ministre avait annoncé un accord avec la plupart des partis danois pour soumettre à un référendum la fin de l'exception à la politique européenne de Défense, ainsi qu’une augmentation des investissements du budget de la Défense au-dessus de la barre des 2% du PIB. « Le peuple danois a fait un choix historique », s'est félicité Charles Michel, le président du Conseil européen tandis que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen saluait sur twitter : « le message fort d'engagement envers notre sécurité commune envoyé par le peuple danois et je suis convaincue que le Danemark et l'UE tireront profit de cette décision ».
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