Les géants américains de l'armement choyés par le Pentagone

Dans un rapport publié fin juin, l'ONG américaine Project on Government Oversight (POGO) révèle qu’en une seule année, plusieurs géants de l'industrie de Défense américaine ont obtenu 300 millions de dollars initialement destinés aux petites entreprises.

En un an, des entreprises telles que Lockheed Martin, Raytheon ou L3Harris se sont partagées au moins 339 millions de dollars destinés aux petites entreprises. Cette somme provient d'un fonds de 33 milliards de dollars qui devait soutenir les petites entreprises du secteur militaire, en difficultés depuis plusieurs années. Selon l'ONG POGO, cet usage du programme de la Defense Logistics Agency (DLA) risque d'entraîner la faillite de petites entreprises, éliminer donc la concurrence et permettant ainsi aux grands groupes de faire monter les prix. D'après l'avocat Robert Burton, un ancien cadre dans les marchés publics fédéraux, c'est la taille du programme qui favorise les dysfonctionnements : "En général, nous n’avons pas de fonds de 33 milliards de dollars sur 10 ans, a-t-il déclaré. Celui-ci est spécial parce que le département de la Défense des États-Unis détient l'ensemble de la somme destinée aux petites entreprises."

Ce programme TLS (Tailored Logistics Support) de la DLA est sous-traité à 4 intermédiaires qui ne se tournent pas toujours vers des entreprises modestes. L'ONG POGO rapporte que l'un d'entre eux, Atlantic Diving Supply, dont la majorité des revenus proviennent du programme TLS, a attribué pour au moins 150 millions d'euros de marché public à L3Harris qui est au 9e rang des entreprises de Défense américaine. Ces contrats avec des géants du secteur sont possibles grâce à des dérogations fournies aux intermédiaires par la Small Business Administration (SBA). En 2017, l'administration américaine n'accordait que la moitié des demandes de dérogation. En 2021, 93% d'entre elles étaient approuvées.

Crédit : ONG POGO

"Les dérogations ne s’appliquent qu’aux éléments qu'elle concerne, et non à l’ensemble du contrat », se justifie la SBA, ajoutant que la DLA enfreint ses règlements avec son interprétation trop large des dérogations. Qu'il s'agisse d'une utilisation trompeuse des fonds ou d'un dysfonctionnement du processus d'attribution des marchés, ce problème va au-delà des actions d'un individu selon Robert Burton : "Soit il y a une violation des règles en vigueur, soit le système le permet" , a-t-il déclaré. « L’un ou l’autre est mauvais. »