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Découvrir l’Histoire de la Légion étrangère

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Bienvenue dans Defense Zone, le Podcast qui traite des questions de défense et de sécurité à travers des entretiens avec des militaires, des membres des forces de l'ordre, des personnalités politiques, ou encore des entrepreneurs.

L'objectif de cette émission audio disponible sur toutes les plateformes en ligne de Podcast est d'ouvrir au grand public les portes d'un univers d'ordinaire plutôt secrets, dans le but de donner à réfléchir à des questions qui nous concernent tous, quelles soient politiques, géopolitiques, économiques ou plus largement sociétales.

Dans ce nouvel entretien, Défense Zone vous emmène à la découverte du Musée de la Légion étrangère, à Aubagne. L’aspirante Lisa est l’officier en charge de la conservation des collections du musée, et nous explique son parcours pour arriver à ce poste avant de présenter le lieu, les collections et ses missions.

 


 

Le parcours de l’aspirante Lisa

Lisa étudie l’histoire de l’art à Poitiers et obtient un master « Patrimoine et musée ». Pendant son cursus, le monde militaire est un sujet peu abordé, car son étude dépend du lieu de l’école et des collections accessibles : « l’école du Louvre par exemple a un cursus patrimoine militaire », précise-t-elle. Elle y est toutefois sensibilisée grâce à une enseignante réserviste à la délégation du patrimoine de l’armée de Terre aux Invalides, qui aborde les peintres des armées reproduisant à l’époque les scènes de bataille. Lisa réalise son stage au sein de cette délégation, et sous le commandement de l’ancien conservateur du musée de la Légion Etrangère, elle en apprend ainsi plus sur les légionnaires et le musée qui leur est dédié à Aubagne. Les nombreuses anecdotes racontées par son supérieur durant son stage et une opportunité lorsqu’une place se libère la poussent à postuler pour un poste au musée de la Légion. Elle signe un contrat d’un an de volontaire aspirant, pour le poste d’assistante à la conservation.


Ses missions au sein du musée

La jeune officier souligne la « diversité des missions » en détaillant les tâches qu’elle doit accomplir au musée. La principale est évidemment la conservation préventive des objets, dont une grande partie se trouve en réserve et non exposée. Il s’agit aussi gérer les acquisitions, qui se font par le biais de dons (familles d’anciens légionnaires, peintres des armées…) ou d’achats lorsque le musée repère un objet particulièrement intéressant aux enchères. La transmission est primordiale, c’est pourquoi l’aspirante Lisa est en charge de la préparation des expositions ainsi que des visites, pendant lesquelles « il faut adapter le discours en fonctions des âges, des langues… » Le pôle muséal de la Légion comprend un centre de documentation et des archives, dont le fond est régulièrement alimenté. Enfin, une mission importante de Lisa est la gestion des prêts d’objets du musée à destination des salles d’honneurs des différents régiments de la Légion Etrangère, qui en accueillent tout au long de l’année afin de les mettre en valeur tout en instruisant les nouvelles recrues.

Musée Légion étrangère, Aubagne, 1er RE

Si Lisa apprécie la variété des missions, elle se souvient tout de même de son arrivée au musée et de la différence entre la théorie apprise pendant ses études et la réalité de son poste au sein de l’institution : « en histoire de l’art, on apprend à conserver les objets et ce sont surtout des peintures, des sculptures, quelques bronzes… Là je suis arrivée, on m’a mise entre les mains des drapeaux, des armes, des uniformes… J’ai dû réapprendre la théorie. » Un choix qu’elle «ne regrette pas du tout », contente de « connaître cet univers vraiment très particulier. »


Les particularités du musée de la Légion Etrangère

« La Légion a une histoire à part, donc le musée qui raconte cette histoire est forcément un musée à part », raconte l’aspirante Lisa, qui précise aussi qu’il s’agit du seul musée de la Légion, et que l’établissement a reçu le label « Musée de France ».

Ce label a d’ailleurs fait connaître le musée au grand public, et a permis de le faire découvrir à des personnes initialement moins attirées par la Légion Etrangère ou qui n’osaient pousser la porte. Des ateliers pédagogiques sont proposés aux écoles des communes voisines ou lors des journées européennes du patrimoine. Les réseaux sociaux sont utilisés de plus en plsu afin d’atteindre un public plus jeune. L’aspirante précise aussi que de nombreux chercheurs se rendent au centre de documentation de la Légion Etrangère afin d’accéder aux archives des régiments, notamment des JMO (journaux de marche et d’opérations), à diverses documentations ainsi qu’à des thèses déjà publiées sur le sujet.

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Le cœur de cible du musée reste toutefois le légionnaire lui-même. L’histoire de ceux qui l’ont précédé, leurs particularités, sont mises en avant afin d’être transmises aux recrues d’aujourd’hui.


Transmettre l’Histoire de la Légion Etrangère

Ainsi, le légionnaire se rend plusieurs fois au musée au fil de son parcours et de sa carrière : lors de la signature de son contrat, après les quatre mois d’instruction avant d’être affecté à un régiment… La salle d’honneur d’Aubagne est le témoin de leur histoire. L’officier explique : « dans le parcours permanent [du musée] ou dans la salle d’honneur, on raconte le récit du combat de Camerone. C’est la fête de la Légion, célébrée tous les 30 avril. Ce combat met en avant toutes les qualités que doit avoir un légionnaire : le sentiment de mener la mission jusqu’au bout, s’il le faut au péril de sa vie, et de n’abandonner ni ses morts ni ses blessés. » Ce récit forme le légionnaire en lui montrant son histoire et ce vers quoi il doit tendre, pour respecter les valeurs de la Légion et perpétuer ses fortes traditions.


La bataille de Camerone

L’aspirante Misa nous rappelle le déroulé de la bataille de Camerone, emblématique de la Légion, qui s’est déroulé en avril 1803 lors de la campagne au Mexique : « l’unité du capitaine Danjou doit protéger un convoi entre deux villes, destiné à construire un avant-poste et amener nourriture et munitions aux troupes. Sur la route, le convoi est attaqué par des soldats mexicains, et les légionnaires sont forcés de se replier dans une hacienda (ndlr : grand bâtiment d’une exploitation agricole) puis dans la cour. Il y a 63 légionnaires pour plus de 2000 Mexicains, sans vivres, sans munitions. La maison est mise à feu par les soldats ennemis, à laquelle se rajoute la chaleur du pays. Les légionnaires tombent les uns après les autres mais refusent de se rendre. Le capitaine Danjou fait promettre à ses hommes à ses hommes de mener la mission à bien et de ne pas se rendre. Quand les soldats mexicains finissent par réussir à entrer, cinq légionnaires sont encore debout et acceptent de se rendre à une condition : repartir avec leurs morts et leurs blessés. A l’époque, ce privilège n’est accordé qu’aux vainqueurs, cependant les troupes adverses acceptent car « on ne refuse rien à des hommes tels que vous ». C’est ainsi que le récit de la bataille a pu être transmis. De plus, la mission a été remplie, car le convoi a pu continuer à avancer et est arrivé à destination. » Cette valeur fondamentale de ne pas abandonner les siens s’illustre par un autre détail qu’ajoute l’officier : « le capitaine Danjou s’est blessé avant la campagne et avait une prothèse de main en bois. Celle-ci a été ramenée et est conservée au musée ». Elle est d’ailleurs sortie chaque année pendant les commémorations de Camerone, lors desquelles un blessé de la Légion se recueille devant le monument aux morts avec cette prothèse, afin de montrer l’attachement de la Légion à ne pas oublier ses anciens.

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Les thématiques et objets du musée

Ce musée qui raconte « l’Histoire de la Légion » est composé d’un parcours permanent chronologique, illustrant la création de la Légion Etrangère, les grandes campagnes successives jusqu’aux opérations extérieures actuelles, les différentes spécialités des régiments (génie, cavalerie, parachutistes…), et comportant des uniformes et armements qui ont évolué, des drapeaux représentant les compagnies et régiments, des œuvres d’art, des photos etc. « Le militaire n’est pas juste un soldat, c’est aussi un humain qui vit, mange, dort, construit des casernement », affirme Lisa, et il fallait le montrer dans ce musée. Le disque d’or attribué à la musique de la Légion, seule musique militaire à l’avoir reçu, trône ainsi dans le musée d’Aubagne. Spécialistes comme néophytes de la Légion peuvent se retrouver dans ce musée qui apporte de nouvelles connaissances à chaque visiteur.


La Légion, entre mythe et réalité

La figure du légionnaire s’est construite par la bataille de Camerone, mais aussi par des clichés véhiculés par le grand public. Si la mission du musée est de transmettre l’histoire, la jeune officier signale aussi vouloir combattre les idées reçues, « sans déconstruire le mythe car ce mythe est vendeur et certaines choses sont vraies, mais on essaye de faire la part des choses. » Elle entend couramment que le légionnaire est « un criminel qui vient à la Légion Etrangère pour avoir une deuxième vie. Ça pouvait être vrai au moment de la création de la Légion car les candidatures étaient ouvertes à tout le monde ; maintenant, un service s’assure que le candidat n’a commis aucun crime de sang, de drogue ou de viol. » A contrario, si Lisa pensait que l’image « d’esprit de corps, de frères d’armes » était exagérée, elle s’est rendue compte que cette cohésion au sein de l’armée était bien réelle : « on sait qu’on peut compter les uns sur les autres, l’esprit de solidarité de la Légion Etrangère est important. » Les bénéfices de la boutique du musée servent d’ailleurs à aider les légionnaires blessés.

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De plus, l’image un peu rustre qui colle à la Légion, et aux militaires en général, a dans un premier temps inquiétée la famille de Lisa, qui voyait mal une femme venir dans ce milieu très masculin. L’officier assure pourtant : « ce n’est pas un monde de barbares, au contraire. »


Une femme à la Légion Etrangère

Lisa est l’une des rares femmes de ce corps d’armée. Officier Légion, et non légionnaire, car elle le rappelle, « on appelle seulement légionnaire une recrue qui a reçu son képi blanc », après une phase d’instruction de quatre mois validée par une marche de 60 kilomètres en deux jours. Elle admet qu’elle n’aurait pas été capable de faire cette marche, étant moins aguerrie physiquement, « mais la Légion est un endroit où chacun à sa place, sert le même objectif. Moi, je prends le temps de travailler dans un musée pour montrer ce que eux [les légionnaires] peuvent faire quand ils sont en opérations extérieures ou intérieures. »

Pour expliquer l’absence de femmes au sein de la Légion, l’officier relève les différences, tant au niveau des nationalités (plus de 150), des cultures, des religions : « c’est un équilibre difficile à contenir, qui s’atteint par une rigueur stricte obtenue durant leur formation. Il serait compliqué en l’état actuel de mettre des femmes dans ce « cocktail ». La cohésion s’obtient par la cohabitation ; ça peut parfois être explosif selon les tempéraments, les différences, et la place de la femme n’est pas la même dans tous les pays. »


Les nouveautés au sein du musée

Comme évoqué précédemment, les nouvelles acquisitions du musée s’effectuent par des dons ou lorsque des offres se présentent. Cependant les musées de France ont des obligations et les achats sont encadrés par des commissions scientifiques d’acquisition. « Le musée essaye de varier afin de ne pas avoir de doublons d’objets », indique Lisa, et ainsi proposer les collections les plus étendues au public.

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Parfois, ces nouvelles acquisitions font l’objet de recherches préalables, et donc de nouvelles découvertes. Des expositions temporaires peuvent ainsi voir le jour, comme celle proposée en ce moment et dont nous vous parlions dans un précédent article. « La Légion Etrangère, du Maroc au Levant » a ainsi été réfléchie à l’occasion des centenaires du 4e régiment étranger de Castelnaudary (l’école de la Légion, créée en 1920) et du 1er régiment étranger de cavalerie (créé en 1921). Elle montre comment la Légion s’est adapté à ses besoins et son environnement. Les extraits de films de l’époque permettent, encore une fois, de comparer la réalité et l’image véhiculée, car si le synopsis général est souvent basé sur des faits réels, la vie du héros est romancée : le légionnaire, « c’est le James Bond de 1900 ! » 

 

Notre vidéo récap pour tout savoir sur la Légion étrangère

 

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