Devenir policier en Compagnie Républicaine de Sécurité
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Bienvenue dans Defense Zone, le Podcast qui traite des questions de défense et de sécurité à travers des entretiens avec des militaires, des membres des forces de l'ordre, des personnalités politiques, ou encore des entrepreneurs.
L'objectif de cette émission audio disponible sur toutes les plateformes en ligne de Podcast est d'ouvrir au grand public les portes d'un univers d'ordinaire plutôt secrets, dans le but de donner à réfléchir à des questions qui nous concernent tous, quelles soient politiques, géopolitiques, économiques ou plus largement sociétales.
Cette semaine, le Commissaire Sébastien Malzieu nous présente les Compagnies Républicaines de Sécurité, cette unité de la Police Nationale aux multiples missions. Elles sont notamment chargées du maintien de l’ordre, thématique au cœur de notre dossier du dernier numéro, disponible ici.
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Sébastien est actuellement dans sa quatrième année en tant que directeur zonal adjoint de la Compagnie Républicaine de Sécurité Ile-de-France. Il est policier depuis plusieurs dizaines d’années sur Paris et sa banlieue, surtout au sein de services anticriminalité et problèmes urbains. A son poste, il supervise 2 500 policiers répartis en une dizaine de compagnies. Il gère la « mise en condition et mise à disposition des CRS auprès des Préfets », explique le Commissaire, y compris « ceux qui viennent de province pour renforcer les opérations dans la capitale. »
Les missions des Compagnies Républicaines de Sécurité H2
Les 13 646 policiers des CRS sont notamment connus en maintien de l’ordre, cependant leurs missions sont variées. Ils assurent également l’encadrement d’événements festifs ou revendicatifs, de la sécurisation, du renfort au profit des commissariats de police notamment en banlieue, de l’appui à la police aux frontières, de la lutte contre l’immigration clandestine (Calais, zones portuaires…), de l’appui aux opérations côtières grâce aux plongeurs et matériels des CRS, du secours classique (nageurs-sauveteurs, secouristes en montagne…) et enfin la protection de hautes personnalités. La CRS 1 est dédiée spécifiquement à cette dernière mission avec le SDLP, le service de la protection.
La formation pour intégrer les CRS H2
« Tous les corps de la police sont représentés au sein des CRS : personnel administratif, technique, actif, c’est-à-dire les policiers, policiers adjoints, gardiens de la paix, officiers et commissaires de police », précise Sébastien. Il ajoute que chaque CRS est « avant tout gardien de la paix », statut qui s’acquiert après une formation commune à tous. Les jeunes recrues sortant d’école et bien classées peuvent prétendre à être affectées à une compagnie. Ils suivent alors le « module d’adaptation au premier emploi », un premier stage spécifique de trois semaines durant lequel les gardiens de la paix s’initient aux techniques, moyens et matériels mis à leur disposition dans le cadre de leur futur emploi. Les policiers intégrés à l’une des neuf compagnies autoroutières du territoire participent eux-aussi à un module spécifique, relatif à l’environnement risqué dans lequel ils vont évoluer.
Les candidats provenant d’autres directions actives et souhaitant intégrer les Compagnies Républicaines de Sécurité doivent suivre un « stage de spécificité CRS », d’une durée de trois semaines pour le maintien de l’ordre et de deux semaines pour les unités autoroutières.
Les officiers assistent également à une période d’adaptation à l’emploi, pendant quatre semaines.
Enfin, les policiers des CRS bénéficient d’une formation continue « riche et développée », indique le Commissaire. « Chaque agent a 25 jours par an de formation », de plusieurs types : entraînement collectif, recyclage annuel, tir, manœuvres, spécificités CRS…
Ces formations se déroulent à la Direction centrale de la formation de la Police Nationale mais aussi au sein des structures propres aux CRS, de par leurs particularités qui ne concernent par les autres directions.
Les candidats doivent faire preuve de « discipline, courage, rigueur, esprit de camaraderie, professionnalisme », énumère Sébastien. Spécialement pour le maintien de l’ordre qui implique « un mode de vie particulier », le policier doit être « apte à se déplacer en permanence », une compagnie se déplaçant environ 200 jours par an.
La gestion des risques du métier de CRS H2
Le directeur zonal adjoint explique que « c’est dans l’ADN des CRS d’être engagés sur tous les fronts où il y a un risque potentiel et souvent avéré. »
Les risques physiques H3
Les CRS prennent le relai des commissariats de police et des directions départementales de la sécurité publique lorsque des violences majeures sont attendues lors d’opérations de maintien de l’ordre. On les retrouve aussi dans d’autres situations extrêmes où le danger est présent, sur autoroute ou en montagne par exemple.
Pour Sébastien, ces risques sont surmontables grâce à « la cohésion, la solidarité, l’effet de groupe ». Il souligne également l’avantage d’avoir un « commandement intégré en permanence au sein des effectifs », des gradés au contact du personnel sur le terrain.
Le dispositif de secourisme opérationnel H3
Ce dispositif est inspiré des opérations de secourisme menées par les militaires et a été adapté pour les CRS. Chaque compagnie compte parmi ses effectifs deux SOC (secourisme opérationnel CRS) de niveaux 2 capables de secourir et stabiliser des blessés. Intégrés aux opérations, ils peuvent ainsi intervenir rapidement pour trier les victimes, évaluer la gravité de leurs blessures, et porter secours « aux effectifs CRS mais aussi aux civils, manifestants, victimes de toute nature », précise le Commissaire. La plupart du temps, les blessures rencontrées sont peu graves ; toutefois les agents peuvent recevoir des projectiles dans le cadre du maintien de l’ordre.
Ce dispositif existe depuis 2012 et fait partie des formations annuelles suivies par les policiers des Compagnies Républicaines de Sécurité. Il a pris tout son sens depuis les attentats, énonce Sébastien : « Dans un contexte de victimes nombreuses, nous pouvons mettre à disposition des sapeurs-pompiers ou des médecins du SAMU un grand nombre de matériel pour traiter les urgences vitales dans un contexte dégradé. Ces secouristes opérationnels sont capables dans chaque compagnie de faire de l’extraction de victimes sous le feu. »
Le développement de l’équipement H3
Le matériel est adapté et amélioré au fil des ans : casque plus résistant, tissu ignifugé, compromis mobilité/protection la plus efficace possible… « Il y a en permanence une volonté de développer de nouveaux équipements, de nouvelles doctrines ou procédures. Nous avons d’ailleurs à la Direction centrale des CRS un bureau de prospective et de réflexions tactiques. » Chaque opération, que ce soit de maintien de l’ordre, routière, en montagne, en mer… fait systématiquement l’objet d’un retex (retour d’expérience). Cette analyse permet de réévaluer les techniques, les manœuvres, l’utilisation des moyens et leur mise à disposition. Les policiers n’hésitent pas à coopérer à l’internationale afin d’échanger les savoir-faire.
Les risques psychologiques H3
Un service de soutien psychologique opérationnel est déployé lors de chaque intervention difficile, « pas forcément violente », précise Sébastien, « mais sur lesquelles il peut y avoir un retentissement psychologique notamment des morts, ou qui peut rappeler de mauvais souvenirs. » Il est activé systématiquement pour les unités autoroutières, confrontées à de nombreux accidents de la route, impliquant des blessés souvent graves.
Ce service est également proposé aux familles des policiers, qui peuvent être affectées indirectement par une situation difficile vécue par l’agent.
Le cadre juridique du maintien de l’ordre H2
Tout comme l’équipement, le cadre juridique des forces de l’ordre évolue également, comme vous pouvez le découvrir en détail dans notre dernier magazine. Les CRS doivent ainsi adapter leurs modes de fonctionnement et d’action au cadre que la loi leur impose. « Parfois, on aimerait pouvoir faire un tas de choses que nous ne pouvons pas faire », raconte le Commissaire, « Mais ça ne pose pas de difficultés majeures, car c’est le propre d’un service de l’état démocratique de s’adapter. Le tout est de connaître ce cadre, les possibilités que nous avons, pour pouvoir ensuite utiliser les moyens, manœuvres et techniques pour participer aux opérations de maintien de l’ordre. Le but est que les manifestations se passent le mieux possible, en protégeant les citoyens qui manifestent normalement, en leur permettant d’exercer leur liberté de manifester, et en intervenant de manière ferme contre les auteurs de violences graves à l’encontre des manifestants ou des forces de l’ordre. »
Le salaire d’un CRS H2
Le salaire d’un policier en Compagnie Républicaine de Sécurité est d’environ 1 800€ par mois en début de carrière. Toutefois des indemnités journalières de 40€ par jour s’ajoutent lors des déplacements, et les heures supplémentaires sont comptées et indemnisées aussi. Le salaire peut ainsi vite grimper, ce qui attire certains policiers. « D’autres sont attirés par le mode de vie », ajoute Sébastien, « d’autres encore par cette vie collective, ou tout simplement par les missions très riches, mais aussi par les possibilités d’évolution, ou les spécialités. »
A noter que, contrairement aux gendarmes qui vivent parfois avec leur famille en caserne ou logement mis à disposition, les CRS sont du personnel civil et doivent trouver leur logement par leurs propres moyens. Il n’existe pas d’aide financière particulière, toutefois un dispositif d’assistance sociale existe au sein de la Police Nationale. Elle peut être sollicitée dès la sortie d’école de police, ou encore lors d’une séparation par exemple.
Conseil à un jeune souhaitant intégrer les CRS H2
Le Commissaire Sébastien préconise de prendre directement contact avec les policiers des compagnies afin de mieux comprendre leurs missions, échanger avec eux et qu’ils puissent leur transmettre leur passion du métier.
Aux lycéens et étudiants, il leur conseille avant tout de réussir leur bac ou diplôme, afin de réussir par la suite le concours d’entrée (gardien de la paix, officier, commissaire de police, personnel administratif…)
Enfin, rappelle que certaines qualités sont indispensables pour exercer ce métier : « avoir l’envie d’être utile, vouloir servir, être rigoureux, professionnel, avoir de la discipline. » Sébastien insiste particulièrement sur cette dernière valeur, fondamentale lors des opérations : « La résistance aux chocs, la résilience, vient du fait que les personnels sont formés, encadrés, et parce qu’ils sont disciplinés. C’est lors de ces moments difficiles, quand le personnel est pris à partie, se prend des projectiles ou des engins incendiaires, que la discipline est importante. Parce que c’est dans la retenue et l’usage modéré et gradué de la force que l’on tire toute l’utilité des CRS. »
Retrouvez l'intégralité de notre dossier sur le maintien de l'ordre dans le numéro 4 de Défense Zone en suivant ce lien
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