La Royal Navy évite de justesse l'accident d'un sous-marin nucléaire (actus de la semaine)
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[Artillerie]
Nexter, également connu sous le nom de KNDS France, a accéléré sa production du système d'artillerie CAESAr de 155 mm, livrant six des dix-huit unités commandées en juillet 2022 en avance sur le calendrier. Ces livraisons compensent le matériel cédé à l'Ukraine. Cependant, les sénateurs Hugues Saury et Hélène Conway-Mouret ont critiqué la lenteur de l'aide militaire française à l'Ukraine, soulignant la nécessité d'éviter de reproduire ces retards avec d'autres démocraties ex-soviétiques.
Ils ont spécifiquement mentionné l’Arménie, qui fait face à des menaces territoriales de la part de l'Azerbaïdjan. Paris a promis un soutien militaire à Erevan, incluant un appui pour la modernisation de ses forces armées, la formation dans divers domaines de combat, la fourniture de missiles sol-air Mistral 3 et des véhicules blindés Bastion. Les sénateurs ont insisté sur la nécessité de répondre rapidement aux demandes arméniennes, y compris pour des équipements d'artillerie.
Les deux sénateurs recommandent en particulier d'examiner la possibilité de fournir des systèmes CAESAr aux Arméniens, en tenant compte de l'augmentation des capacités de production de Nexter en 2024. Toutefois, l'Arménie a déjà passé commande pour des obusiers automoteurs MArG 155 de 155 mm auprès du groupe indien Bharat Forge Kalyani Group, ce qui pourrait rendre cette proposition française trop tardive.
Les rapporteurs suggèrent également d'étendre ce soutien à d’autres pays cherchant à s'éloigner de la Russie et à aligner leur défense sur les normes de l'OTAN, comme la Moldavie et la Géorgie. Pour eux, l'aide française serait cruciale pour renforcer leur indépendance.
[Royaume-Uni]
Un incident critique a été évité de justesse par un sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) de la classe Vanguard de la Royal Navy, équipé de missiles Trident. Cet incident, qui s'est produit il y a plus d'un an mais n'a été révélé que récemment par la BBC et The Sun, a été causé par une défaillance de la jauge de profondeur principale du sous-marin. En plongée, le sous-marin a dépassé la profondeur prévue, s'approchant dangereusement de sa "profondeur d'écrasement" où la coque du sous-marin pourrait céder sous la pression de l'eau. Heureusement, une jauge de profondeur secondaire, toujours opérationnelle, a permis à l'équipage de corriger le cap et d'éviter un désastre.
Cet incident soulève des questions sur la sécurité et la maintenance des sous-marins nucléaires britanniques. Ces submersibles, qui sont en service depuis les années 1990, jouent un rôle crucial dans la stratégie de dissuasion nucléaire du Royaume-Uni.
Chaque sous-marin, mesurant environ 150 mètres de long et d'un déplacement de 16 000 tonnes, peut transporter jusqu'à 16 missiles balistiques Trident II, chacun capable d'emporter plusieurs têtes nucléaires. La Royal Navy maintient une présence continue de ces sous-marins en mer depuis 1967, garantissant ainsi la capacité de seconde frappe du pays en cas d'attaque nucléaire.
La découverte d'un défaut sur le HMS Vanguard lors d'une maintenance en février dernier avait déjà soulevé des inquiétudes. Des techniciens avaient utilisé de la colle pour réparer des boulons sur l'isolant des tuyaux de refroidissement du réacteur nucléaire, une procédure qui a été rapidement corrigée avant que le Vanguard ne quitte le chantier naval en mai pour subir des tests supplémentaires. Le Royaume-Uni travaille actuellement à la construction d'une nouvelle classe de sous-marins, les Dreadnought, pour remplacer les Vanguard vieillissants.
[Europe de la Défense]
Le débat sur la définition exacte des dépenses militaires est complexe, impliquant divers éléments comme les pensions, les budgets de la gendarmerie, les Anciens combattants, et le soutien aux industries de l’armement.
En France, par exemple, le budget de la mission "Défense" a été fixé à 40,9 milliards d'euros en 2022, augmentant de 4%, avec un ajout supplémentaire de 1,4 milliard d'euros en fin d'année. Cependant, l'OTAN a rapporté des dépenses militaires françaises de 49,6 milliards d'euros pour la même année, tandis que l'Agence européenne de défense (AED) a indiqué une augmentation de seulement 0,7%, en l’ajustant sur l'inflation.
Malgré ces divergences, l'AED a noté que les dépenses militaires des 27 pays membres de l'UE ont atteint un total de 240 milliards d'euros en 2022, un chiffre impressionnant mais toujours bien inférieur au budget du Pentagone. Le Haut représentant de l'Union, Josep Borrell, a souligné la nécessité de dépenser de manière plus efficace et collective pour combler les lacunes.
Parmi les pays de l’UE, la Suède a été un acteur majeur de la hausse des dépenses militaires en 2022, suivie par d'autres comme le Luxembourg, l'Espagne, la Belgique et la Grèce. Cependant, certains pays comme les Pays-Bas ont réduit leur budget militaire, bien que cela ne reflète pas nécessairement une baisse des investissements en équipement.
Dans l'ensemble, l'UE a consacré 1,5% de son PIB à la défense, en dessous de l'objectif de 2% de l'OTAN. Les dépenses d'investissement ont totalisé 58 milliards d'euros en 2022, avec une perspective de 600 milliards d'euros d'investissements possibles sur dix ans. Charles Michel, président du Conseil européen, a plaidé pour un "marché unique de la Défense" et pour transformer l'AED en un département de la Défense européen. Cependant, cela nécessiterait une révision des traités européens et l'accord des États membres.
Un rapport de l'IRIS a révélé que 78% des commandes d'équipements européens depuis février 2022 ont été passées auprès de pays non membres de l'UE, avec une grande partie des commandes allant aux États-Unis. Ce schéma pourrait se poursuivre, étant donné la réduction des investissements européens en recherche et technologie dans le domaine de la défense.
[Aéronautique]
L'Ouzbékistan, une ancienne république soviétique, a récemment exprimé un vif intérêt pour l'acquisition de 24 chasseurs-bombardiers Rafale de Dassault Aviation, une décision qui pourrait marquer un tournant dans sa politique de défense. Habituellement orienté vers les puissances régionales comme la Russie, la Chine et la Turquie, et avec des achats militaires français relativement modestes jusqu'à présent, ce virage vers le Rafale indique un désir de modernisation et d'ouverture à de nouvelles alliances de défense.
L'actuel parc aérien de l'Ouzbékistan, composé principalement d'avions soviétiques vieillissants, soulève des questions quant à son efficacité opérationnelle. Le choix du Rafale, réputé pour sa technologie avancée et sa polyvalence, témoigne d'une ambition de renouveler et de renforcer la capacité aérienne du pays. Bien que cet intérêt pour le Rafale soit considéré comme sérieux, l'Ouzbékistan envisage également d'autres options, notamment le F/A-50 Golden Eagle sud-coréen.
Ce développement intervient dans un contexte géopolitique complexe. La récente visite du président français en Ouzbékistan et au Kazakhstan a suscité des discussions sur les ventes potentielles de Rafale. Toutefois, la probabilité d'une commande kazakhe semble faible, étant donné les engagements du pays au sein de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC, alliance intergouvernementale d’ex-républiques soviétiques) pour l’acquisition d'avions russes.
La décision finale de l'Ouzbékistan de se doter du Rafale aurait des implications majeures, non seulement pour Dassault Aviation mais aussi pour les dynamiques régionales, remettant potentiellement en question les alliances traditionnelles et les équilibres de pouvoir dans la région.
[Industrie]
La tendance à l'augmentation de la demande d'armements à l'échelle mondiale ne se traduit pas par une hausse équivalente des revenus des grands industriels du secteur, selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI). Les revenus combinés des plus grandes sociétés d'armement ont baissé de 3,5 % en 2022, atteignant 597 milliards de dollars contre 619 milliards en 2021. Lucie Béraud-Sudreau, directrice du programme de dépenses militaires et de production d’armes du SIPRI, explique : "Le délai entre la demande d’armes et leur livraison par les fabricants est souvent long... le chiffre d'affaires n’augmente que quand le produit fini est livré au client."
Cette baisse s'explique par des problèmes persistants dans les chaînes d'approvisionnement et des pénuries de main-d'œuvre résultant de la pandémie de covid-19. Les entreprises américaines et européennes, en particulier, ont du mal à adapter leur production à la forte demande. Nan Tian, chercheur principal au SIPRI, souligne : "Les revenus générés par ces nouvelles commandes ne se refléteront dans les comptes de l’entreprise avant probablement deux à trois ans."
En revanche, les entreprises asiatiques, comme celles de la Chine, de l’Inde, du Japon, de Taïwan ou de la Corée du Sud, ont vu leur chiffre d'affaires augmenter, bénéficiant d'investissements gouvernementaux dans des programmes de modernisation militaire. Les sociétés israéliennes et turques ont également enregistré une croissance, notamment grâce à une plus grande réactivité et flexibilité de production.
Malgré la baisse actuelle, les perspectives à long terme suggèrent une reprise potentielle. Des carnets de commandes bien remplis et une vague de nouveaux contrats laissent présager une augmentation substantielle des revenus mondiaux de l’armement dans les prochaines années. Par exemple, MBDA et Saab ont rapporté des commandes considérablement accrues en 2022 présageant un renversement de tendance pour l'industrie de l'armement dans un avenir proche.
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