La Russie va-t-elle reprendre ses essais nucléaires ? (actus de la semaine)
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[Russie]
L'état actuel de la sécurité mondiale est jugé plus précaire que pendant la Guerre Froide, avec l'obsolescence successive de traités clés de contrôle des armements. Les États-Unis et la Russie ont remis en question des accords tels que le Traité sur les forces conventionnelles en Europe, le Traité sur les forces nucléaires intermédiaires, le Traité Ciel ouvert et le New START. À cela s'ajoutent l'émergence de nouvelles puissances nucléaires et l'expansion rapide de l'arsenal nucléaire de la Chine, qui n'est contrainte par aucun accord international.
Dans ce contexte tendu, la Russie, suivant les directives du président Poutine en octobre, a annulé sa participation au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICEN), se retirant de l'engagement qu'elle avait pris aux côtés du Royaume-Uni et de la France. Les États-Unis n'ont pas ratifié le TICEN tout comme la Chine, la Corée du Nord, l'Inde, le Pakistan et Israël.
L'abandon de la Russie soulève des interrogations sur l'avenir des stations de surveillance de l'Organisation du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, bien que l'opération de ces sites ne semble pas être immédiatement menacée en Russie, indiquant un attachement résiduel au traité.
L'inquiétude réside dans le potentiel de reprise des essais nucléaires par la Russie, en particulier compte tenu des tensions liées à la guerre en Ukraine, bien que Moscou ait déclaré qu'elle n'effectuerait pas d'essais à moins que les États-Unis ne reprennent les leurs. La dernière fois que la Russie a mené un essai nucléaire c'était en 1990, et pour les États-Unis en 1992. Le TICEN vise à interdire tous les essais nucléaires et a établi un réseau global de surveillance pour veiller à son respect. Plus de 2 000 essais nucléaires ont été menés historiquement, principalement par les États-Unis, l'Union soviétique et la France.
[Armée de Terre]
L’année 2023 marque une phase significative pour la réserve opérationnelle française avec le lancement des Journées nationales du réserviste (JNR), s'étendant du 14 octobre au 14 novembre. Cette période est rythmée par des exercices stratégiques dont les opérations Vulcain et Vézinet II, qui illustrent le renforcement et l'intégration accrue des réservistes dans le dispositif de défense national.
L’exercice Vulcain, qui s’est déroulé du 30 octobre au 2 novembre dans l’Allier, a mobilisé 300 réservistes issus de sept unités différentes, notamment des régiments de transmissions, d’infanterie et d’hélicoptères de combat. Cet entraînement était placé sous le commandement de la 4e brigade d’aérocombat et visait à simuler une opération de sécurité sur le territoire national, en coordination avec les unités de la gendarmerie, des pompiers et des services préfectoraux. Cet effort interarmées a souligné l'importance d'une collaboration étroite entre les réservistes et les structures civiles pour la gestion de crises.
Simultanément, l’armée de Terre a organisé l'exercice Vézinet II dans le Loir-et-Cher, sous les ordres de la 2e brigade blindée. Cet exercice, qui fait suite à l’opération ORION de début d’année, a impliqué les réservistes des divers régiments de la brigade dans une série de manœuvres qui s’est jouée entre le 28 octobre et le 3 novembre.
Parties de Vendôme le 28 octobre, la manœuvre s’est ensuite dirigée vers Blois avant de se conclure près de Romorantin le 2 novembre. Vézinet II a mis à l'épreuve près de 260 militaires de la réserve dans des conditions représentatives d’un conflit de haute intensité, avec des actions débarquées ou à partir de véhicules blindés.
Ces exercices s'inscrivent dans la volonté de l’armée de Terre d'atteindre le ratio d’un réserviste pour deux militaires d'active d'ici 2035, comme énoncé par la Loi de programmation militaire 2024-30. Ils visent non seulement à renforcer la préparation opérationnelle des réservistes mais aussi à expérimenter leur intégration dans des opérations complexes, en conformité avec les ambitions du programme "Terre de réserves". Cette initiative traduit une perspective de défense intégrée où la réserve constitue un maillon essentiel, capable d'appuyer et de s'intégrer aux forces actives, pour répondre efficacement aux multiples défis de sécurité auxquels la France pourrait être confrontée.
[Industrie]
En avril, suite à des négociations tendues entre les acteurs industriels, notamment Dassault Aviation et Airbus, la France, l'Allemagne et l'Espagne ont lancé la phase 1B du Système de combat aérien du futur (SCAF), avec la Belgique comme observateur. La France a également prévu d’intégrer le Rafale F5 et un drone du programme nEUROn à son arsenal. Pendant ce temps, l'Allemagne s'inquiète pour l'avenir de l'Eurofighter Typhoon, dont la production risque de s'arrêter en 2030 fautes de commandes, menaçant les compétences et la technologie de l'industrie. L’industrie britannique, quant à elle, mise sur le programme Medulla pour maintenir ses compétences pour le Global Combat Air Programme (GCAP), concurrent du SCAF.
L'Arabie saoudite pourrait influencer le marché en participant au GCAP et en envisageant l'achat de Rafale, après que l'Allemagne a bloqué la vente d’Eurofighters supplémentaires au royaume. Londres essaie de convaincre Berlin de lever son veto pour faciliter cette vente et potentiellement permettre à l'Allemagne de rejoindre le GCAP. Le chancelier allemand, Olaf Scholz, semble ouvert à l'idée de fusionner le GCAP avec le SCAF ou de rejoindre le projet britannique, voyant le SCAF comme un potentiel gouffre financier et préférant aligner ses intérêts avec le Royaume-Uni.
Ces manœuvres pourraient affecter d'autres projets franco-allemands, y compris le Système principal de combat terrestre (MGCS). L'implication possible de l'Allemagne dans le GCAP soulève des questions sur le rôle de son industrie dans ce projet, les alternatives pour la France et les répercussions pour l'Espagne.
[Armée de l’Air et de l’Espace]
Plus de deux cents aviateurs de l'armée de l'Air et de l'Espace ont rejoint l'exercice Atlantic Trident (AT 23), traversant la Manche pour s'entraîner aux côtés de leurs alliés. Dans l'arsenal déployé, on trouve quatre Rafale de l'escadron 3/30 « Lorraine » de la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan et un E-3F Awacs issu de la 36ème escadre de la BA 702 d'Avord, appuyés par le personnel adéquat pour opérer ces appareils. Un A330 MRTT Phénix complète la flotte, opérant depuis la base aérienne 125 d'Istres.
Le déroulement de l'AT 23 s'étend sur plusieurs bases aériennes britanniques. Les forces françaises opèrent à partir de Waddington, les Britanniques depuis le porte-avions HMS Queen Elizabeth, et les Américains établissent leur présence à Lakenheath. Les missions, basées sur des scénarios géopolitiques imaginaires, voient les équipages des trois pays s'entraîner quotidiennement pour des opérations de type « Entry Force ».
L'exercice suit les procédures de l'OTAN pour booster la connaissance mutuelle et l'interopérabilité entre les nations, dans le but de préparer les équipages à des opérations conjointes dans un environnement contesté. Ils sont amenés à planifier et exécuter des missions complexes sous des menaces diverses, tout en assurant un Command & Control efficace par des liaisons de données tactiques.
Ce partenariat tripartite remonte à 2010, quand l'armée de l'Air et de l'Espace, la Royal Air Force et l'US Air Force ont consolidé leur coopération via la Trilateral Strategic Initiative, favorisant le partage stratégique et renforçant les liens opérationnels. Les forces ont déjà mené des exercices communs aux États-Unis en 2015 et 2017, et en France en 2021. Cette année, l'initiative est organisée pour la première fois par le Royaume-Uni, mettant en scène une variété d'avions de combat de pointe, des appareils de ravitaillement et des systèmes de détection et de contrôle.
[Ministère des Armées]
En 2022, le ministère des Armées qui avait prévu un budget de 40,9 milliards d'euros, a reçu une augmentation de 1,3 milliard pour couvrir les coûts opérationnels excédentaires, dont 200 millions alloués aux carburants. Cette augmentation a été rendue possible par des recettes fiscales supérieures aux attentes.
Pour 2023, la Loi de Finances initiale a fixé le budget de la Défense à 43,9 milliards d'euros, en ligne avec les prévisions de la Loi de programmation militaire 2019-2025. Toutefois, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a anticipé le besoin d'une rallonge de 1,5 milliard d'euros pour contrer l'inflation et répondre aux urgences opérationnelles, notamment en matière de lutte anti-drones, renforcée par les leçons tirées du conflit en Ukraine.
Le budget des armées pour 2024, actuellement en discussion au Parlement, devrait atteindre 47,2 milliards d'euros. Le ministère de l'Économie et des Finances a proposé un projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) allouant 2,1 milliards d'euros supplémentaires à la mission Défense pour 2023, soit 600 millions de plus que ce que demandait Sébastien Lecornu, qui s'est publiquement réjoui de cette augmentation significative.
Ce budget supplémentaire comprend 1,5 milliard pour les coûts opérationnels, notamment pour les carburants, et 600 millions pour le programme d'équipement des forces, anticipant les commandes futures et adressant les surcoûts liés au conflit ukrainien, incluant le remplacement d'équipements donnés à Kiev.
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