Brèves DZ #68 : Retrait de Barkhane du Mali, incarcération de soldats de l'ONU ivoiriens au Mali, record de distance de vol pour l'armée de l'Air et de l'Espace, saisie de drogue au port de Marseille
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[Barkhane]
Le lundi 15 août, une page de l’histoire de l’opération Barkhane s’est définitivement tournée. Le départ des militaires de la plateforme opérationnelle désert (PfOD) de Gao marque la fin de la présence française au Mali. Plus grande base de l’opération Barkhane sur le territoire, elle était aussi une des premières mises en place au moment du déclenchement de l’opération Serval en 2013. En février dernier, suite à de nombreux désaccords avec la junte au pouvoir, notamment l’arrivée du groupe paramilitaire russe Wagner et la brusque montée du sentiment anti-français, l'Élysée avait annoncé le départ progressif des troupes, estimant que « les conditions politiques et opérationnelles n'étaient plus réunies pour rester engagées au Mali », et qu’il était désormais nécessaire de réorganiser le dispositif de l'opération Barkhane « en dehors du territoire malien ». Malgré la pression de Bamako pour accélérer le processus, la France a rendu petit à petit ses différentes emprises de Kidal, Tessalit, Tombouctou, Gossi et Ménaka. En effet, la manœuvre était un vrai défi logistique, surtout dans un contexte sécuritaire particulièrement dégradé. Pour preuve, de récents chiffres compilés par l’AFP parlent de la mort de plus de 2 000 civils maliens, nigériens et burkinabés depuis le début de l’année, tués dans toute la sous-région par des groupes armés terroristes, soit déjà autant qu’en 2021 sur toute l’année. Face à cette situation, l’état-major des armées avait gardé secret, jusqu’au dernier moment, la date du départ définitif de Gao. Au total, il a fallu faire sortir du Mali en quelques semaines, plus d’un millier de véhicules dont plusieurs centaines de blindés et près de 4 800 containers. La PfOD a été transférée aux forces armées maliennes (FAMA) déjà colocalisées avec les militaires français avec la base aérienne 103. À proximité se situe aussi une importante base militaire de la mission multidimensionnelle intégrée des Nations-Unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA).
La réorganisation de Barkhane dont les effectifs vont être divisés par deux, soit 2 500 militaires, va désormais s’axer autour des trois grands pôles. La base de N’Djamena au Tchad continuera d’abriter l’état-major de Barkhane une base aérienne projetée et une force protection. Celle de Niamey au Niger, actuel point de repli des forces qui étaient stationnées au Mali, continuera d’accueillir une base aérienne avec des chasseurs et les drones de l’opération. Elle devrait, à terme, garder un groupement tactique désert, chargé notamment d’actions plus au Nord vers la frontière malienne. Pour terminer, la France espère garder, malgré une situation sécuritaire elle aussi compliquée, son détachement de forces spéciales à Ouagadougou, la capitale burkinabè. « Nous restons déterminés à participer à la lutte contre les groupes armés terroristes aux côtés des pays qui en exprimeront le besoin. Ensemble, avec nos partenaires sahéliens, européens et nord-américains, avec les missions internationales présentes au Mali, en particulier la MINUSMA et l’EUTM, nous parviendrons à contribuer collectivement à la sécurité des populations face à la menace terroriste », a déclaré le général Bartaz, le commandant de l’opération Barkhane.
Au moment où nous mettons en ligne ces nouvelles brèves, plusieurs observateurs confirment l’arrivée de forces russes sur la base laissée quelques jours plus tôt par les soldats de Barkhane. Selon des témoignages de Casques bleus allemands, moins de deux jours après la rétrocession de la PfOD de Gao aux forces armée malienne, deux avions ont été observés sur le tarmac de la base : un Embraer 314 Super Tucano et un L-39C Albatros, un des quatre avions récemment livré par la Russie à la junte malienne. Dans un rapport du commandement des opérations militaires conjointes de la Bundeswehr, il est noté, toujours selon les observations des militaires allemands de la MINUSMA, que quelques heures plus tard, « 20 à 30 personnes en uniformes militaires n’appartenant pas aux forces maliennes ont été vues en train de décharger du matériel d’un avion de transport malien. »
[Mali]
Le vendredi 12 août, le gouvernement malien a annoncé avoir placé sous mandat de dépôt avec une inculpation pour « tentative d’atteinte à la sûreté de l’état », les 49 soldats ivoiriens arrêtés le 10 juillet dernier alors qu’ils débarquaient de l’avion sous la bannière de l’ONU. Pour rappel les militaires faisaient partie des Éléments nationaux de soutien (NSE), une procédure de l'ONU permettant aux contingents des missions de maintien de la paix de faire appel à des prestataires extérieurs pour des appuis logistiques de la mission multidimensionnelle intégrée des Nations-Unies pour la stabilisation du Mali (MINUSMA). Leur mandat précisait un déploiement sur la base de Sénou près de Bamako occupée par des NSE allemands. Dès leur arrivée, Bamako a déclaré que ces militaires n’avaient « ni ordre de mission ni autorisation » arguant que le déploiement près de la capitale, alors que le contingent ivoirien de la MINUSMA est situé à Tombouctou plus au nord, prouvait que ces hommes étaient « des mercenaires venus au Mali avec le dessein funeste de briser la dynamique de la refondation et de la sécurisation du Mali, ainsi que du retour à l'ordre constitutionnel ». Au moment de l’arrestation des 49 militaires, le ton était monté très rapidement entre la junte au pouvoir et les autorités onusiennes allant jusqu’à l’expulsion du porte-parole de la MINUSMA : Olivier Salgado.
Le Togo a été désigné comme médiateur entre Abidjan et Bamako, mais une première réunion le 28 juillet à Lomé n’a pas permis d’enregistrer la moindre avancée pour le moment. Les autorités maliennes accusent l'État ivoirien, depuis de nombreux mois, de faire pression sur ses partenaires ouest-africains pour sanctionner les militaires maliens depuis le coup d’État de mai 2021.
[Armée de l’Air et de l’Espace]
C’est un nouveau record que viennent de battre les aéronefs de l’armée de l’Air et de l’Espace. Le 10 août trois Rafale B, accompagnés par deux ravitailleurs A330 MRTT Phénix et deux avions de transport A400M Atlas ont rallié la Nouvelle-Calédonie dans le cadre de la mission "Henri Brown". Le général Stéphane Groën, chef d’état-major du commandement de la défense aérienne, a précisé que « la plus longue projection était jusqu’alors celle réalisée l’année dernière entre la Métropole et la Polynésie française (pour l’exercice "Heifara Wakea", NDLR). Là, nous avons battu cette projection de 2.000 kilomètres (18.000 kilomètres) », et de vanter « la redoutable efficacité du trinôme Airbus MRTT, Rafales et Airbus A400M qui nous permet de nous déplacer partout sur le globe dans des délais très contraints ».
Pour rejoindre Nouméa, le détachement aura eu besoin de trois jours et deux escales, une en Inde et la deuxième à Darwin en Australie. Cette dernière aura durée un peu plus longtemps que prévu, soit 24 heures, pour des contraintes logistiques non précisées. À leur arrivée, de nombreuses autorités attendaient le détachement, dont Sonia Backès, la Secrétaire d’Etat en charge de la Citoyenneté et présidente de la province Sud de Nouvelle-Calédonie, mais aussi la famille du lieutenant Johan Pidjot, premier pilote de chasse d’origine kanake, qui était aux commandes d’un des trois Rafales. « C’est une belle illustration de la stratégie militaire française dans le pacifique sud qui est de défendre ses territoires et les populations et aussi de contribuer à la stabilité régionale en coopérant avec les pays partenaires », a déclaré le général Valéry Putz, commandant de forces armées de la Nouvelle-Calédonie.
Après ce premier grand voyage, les trois Rafales redécolleront pour l’Australie pour participer à l’exercice Pitch Black jusqu’au 10 septembre, ce qui diplomatiquement est un signe d’apaisement entre Paris et Canberra après les tensions entre les deux pays suite à la dénonciation du contrat de commande de plusieurs sous-marins français. Cette projection indopacifique baptisée Pégase 2022 devrait prendre fin le 18 septembre avec un retour par Singapour et la base aérienne française aux Émirats arabes unis.
[Douanes]
Mardi 9 août dans la matinée, des agents des douanes ont fait une saisie de 528 kg de cocaïne sur le port de Marseille. Tôt dans la matinée, les agents ont contrôlé un container de déménagement venant de Martinique. Si les nombreux meubles hétéroclites et les cartons laissaient à penser qu’il s’agissait bien d’un déménagement, c’est l’intervention du chien de l’équipe douanière qui a permis de lever le doute sur le contenu illicite de la cargaison. Après le marquage d'un canapé par l'auxiliaire à quatre pattes, les douaniers ont dévissé une plaque de contreplaqué et découvert 54 pains de cocaïnes. Par la suite, les agents du ministère de l’Économie et des Finances ont découvert d’autres paquets répartis dans plusieurs éléments du mobilier. Au total, les 464 paquets de drogue découverts représentaient une valeur marchande à la revente de plus de 37 millions d’euros.
Cette saisie fait suite à la mise en place début juillet d’une nouvelle unité : l'UCIMAR (unité de ciblage maritime de Marseille) qui centralise les informations des différents services pour mieux cibler les containers susceptibles de faire passer des marchandises frauduleuses. L’UCIMAR a déjà fait ses preuves, puisque le 20 juillet dernier elle a permis la saisie de 70 kg de cocaïne. Pour rappel, en 2021 les douanes françaises ont saisi plus de 18,4 tonnes de cette drogue en pleine expansion sur le territoire national.
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