L'armée de Terre se mobilise pour les JO 2024 (actus de la semaine)
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[Sécurité intérieure]
Alors que le dispositif Sentinelle vient d'augmenter de près de 2 000 militaires en réaction à la situation en Israël, notamment pour renforcer la sécurité autour des sites israélites sur le sol français, et que la coupe du monde de rugby n'est pas encore terminée, les armées pensent déjà au prochain grand rendez-vous : Les JO de Paris 2024. Pour sécuriser ce rendez-vous planétaire qui devrait attirer des dizaines de milliers de personnes, l’armée de Terre envisage de mobiliser jusqu'à 20 000 militaires, soit deux fois plus que l’estimation initiale.
L'armée de Terre sera impliquée dans divers aspects sécuritaires et logistiques des Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024. Les militaires seront principalement déployés dans les villes hôtes des jeux, comme Paris et Marseille, ainsi qu’en Polynésie qui accueillera les épreuves de surf.
Si le renfort des armées ne faisait aucun doute pour sécuriser cet événement majeur, l’augmentation des effectifs prévus semble aussi destinée à pallier les carences de main-d'œuvre rencontrées dans le secteur privé. Initialement, ce dernier était censé fournir entre 17 000 et 22 000 agents de sécurité par jour pendant toute la durée des Jeux, mais cette exigence semble désormais "intenable" en raison de la pénurie de personnel.
Pour éviter les problèmes rencontrés lors des Jeux olympiques de Londres en 2012, où la principale société de sécurité privée n'avait pas été en mesure de fournir suffisamment d'agents, il est essentiel pour les armées d'anticiper et de planifier la mobilisation de ses effectifs.
Selon le chef d'état-major de l’armée de Terre, le général Pierre Shill, des décisions officielles concernant la mobilisation des militaires devront être prises d'ici la fin du mois octobre afin de garantir une planification adéquate en collaboration avec les responsables de la sécurité des Jeux. L'armée de Terre qui sera de facto le plus gros contributeur, se prépare à une mobilisation sans précédent qui coïncidera avec d'autres missions opérationnelles et mémorielles, notamment l'opération de lutte contre les incendies de forêt Héphaïstos et les commémorations du 80e anniversaire du débarquement de Provence. Une fois encore les armées devront compter sur les réserves pour répondre à cette demande accrue pendant la période estivale, elle en compte actuellement près de 24 000.
[Armée de Terre]
En raison de son engagement croissant dans diverses opérations européennes, que ce soit au sein de l'OTAN (Roumanie, Estonie, exercices multinationaux) ou de l'Union européenne (EUFOR Althea en Bosnie-Herzégovine), l'armée de Terre française a établi un Poste de commandement de contingent national Terre Europe Continentale (PC NCC-T-EC) au sein du Commandement des forces terrestres (CFT) à Lille en 2022.
À l’époque dirigée par le général François Goguenheim et composée de 58 militaires, cette structure avait pour mission de fournir un soutien logistique aux unités déployées dans les opérations relevant de sa zone de responsabilité. Cependant, celles-ci se sont avérées trop limitées, ce qui a conduit à sa transformation en un nouveau commandement, le « Commandement Terre Europe » (CTE) depuis le 16 octobre, avec à sa tête l’ancien chef du commandement des opérations spéciales, le général Bertrand Toujouse, dont les attributions devraient être plus étendues.
Cette initiative s'inscrit dans le cadre d'un plan de transformation récemment annoncé par le général Pierre Schill, le chef d'état-major de l'armée de Terre. Le CTE sera chargé de la supervision opérationnelle des unités de l'armée de Terre déployées en Europe et de garantir la cohérence de leur utilisation lorsqu'elles sont placées sous l'autorité d'organisations multinationales ou de coalitions. Il prendra également en charge les aspects de soutien au niveau national.
Cette création vise à renforcer la capacité d'adaptation de l'armée de Terre face aux évolutions géopolitiques en Europe, dans une période caractérisée par de nombreuses incertitudes. Elle contribuera également à l'effort de subsidiarité et à l'amélioration de la réactivité de la France dans le cadre de la solidarité stratégique avec ses alliés européens. L'objectif global du plan de transformation de l'armée de Terre est d'optimiser ses capacités opérationnelles.
[Industrie]
Au début du conflit en Ukraine en février 2022, KNDS produisait deux canons Caesar par mois. Aujourd'hui, l'entreprise parvient à assembler six de ces canons par mois et vise à augmenter ce chiffre à huit dès l'année prochaine. Cette montée en cadence de production répond à l'effort de guerre encouragé par le Président de la République française.
Dans ce cadre, le ministre des armées, Sébastien Lecornu, a visité le site de KNDS à Roanne (Loire) le 16 octobre dernier pour constater cette augmentation de la capacité de production. Grâce à cette accélération, la France pourra remplacer les 18 canons Caesar fournis à l'Ukraine pour renforcer sa défense contre la Russie dès le début de 2024, soit un an plus tôt que prévu. Cette hausse de la production permettra également de répondre aux besoins de tous les partenaires de la France qui choisissent KNDS pour équiper leurs forces terrestres.
En parallèle de cette augmentation de la production, les délais de livraison ont été considérablement réduits, passant de 30 mois à seulement 15 depuis le début du conflit en Ukraine.
Le passage à l'économie de guerre repose sur trois principes : produire davantage, plus rapidement et à des coûts maîtrisés. Outre le Caesar, d'autres domaines ont connu des succès similaires, notamment la production de munitions et de missiles. Par exemple, la livraison de munitions à l'Ukraine passera de 1 000 obus par mois en janvier 2023 à 3 000 en janvier 2024. La production de missiles Mistral par MBDA est passée de 20 à 40 par mois. D'autres entreprises de l'industrie de défense, telles que Thales et Dassault Aviation, ont également augmenté leur production pour répondre à la demande croissante.
Le ministre des Armées a également salué les efforts déployés pour la modernisation des véhicules de l'armée de Terre, notamment à travers le programme Scorpion, qui bénéficie d'un budget de près de 10 milliards d'euros sur la période 2024-2030. Plus de 200 véhicules seront produits chaque année par KNDS pour l'armée de Terre, avec des commandes garantissant une visibilité jusqu'en 2035.
En reconnaissance de leur contribution à cet effort de guerre, le ministre a décerné la médaille de la Défense nationale, échelon argent, à plusieurs employés de l'usine KNDS. Il les a remerciés d'avoir joué un rôle majeur dans la réduction des délais de production et de livraison, saluant leur adaptabilité et leur créativité face à cette urgence.
[Colombie]
La Colombie, partenaire mondial de l'OTAN depuis 2018, avait tissé des liens étroits avec Israël, particulièrement dans le domaine militaire. Cette coopération avait conduit à l'acquisition d'avions de combat Kfir, de fusils d'assaut Galil, de missiles Spike et Python, ainsi que de drones Hermes 900 et 450. Un contrat pour l'acquisition du système d'artillerie ATMOS 2000 d'Elbit Systems était également en discussion. Cependant, une crise diplomatique récente a remis en question cette collaboration.
Tout a commencé avec les attaques terroristes perpétrées par le Hamas le 7 octobre, entraînant une riposte d'Israël. Le président colombien Gustavo Petro, élu en 2022 avec le parti « Colombia Humana », a réagi vivement en dénonçant la riposte israélienne dans la bande de Gaza. Après un échange houleux avec l’ambassadeur israélien à Bogotta le président a déclaré : « Si nous devons rompre nos relations diplomatiques avec Israël, nous le ferons. Le président colombien ne peut pas être insulté. J'appelle l'Amérique latine à montrer une véritable solidarité avec la Colombie ». Le ministre colombien des Affaires étrangères, Alvari Leyva, est également intervenu en exhortant l'ambassadeur israélien à « s'excuser et partir », avant de revenir sur ses propos en précisant qu'il n'avait demandé le départ de l'ambassadeur.
Cependant, la situation s'est rapidement envenimée. Le 15 octobre, le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Lior Haiat, a annoncé que Margarita Manjarrez, l'ambassadrice colombienne en Israël, avait été convoquée en raison des « déclarations hostiles et antisémites » de M. Petro. En réponse, Israël a décidé de suspendre les exportations de produits de sécurité vers la Colombie. Cette décision pourrait avoir un impact sur les relations militaires entre les deux pays, qui ont réalisé de nombreux exercices d'entraînement ensemble.
La crise diplomatique entre la Colombie et Israël pourrait également avoir des conséquences à plus long terme sur les capacités des forces armées colombiennes. Dans un contexte où la Colombie a connu des relations conflictuelles avec d'autres pays de la région, cette rupture diplomatique soulève des interrogations quant à l'approvisionnement en équipements militaires et à la poursuite de la coopération militaire internationale.
[Japon]
Le Japon a récemment réalisé un test de tir avec un canon électromagnétique depuis un navire de sa force maritime d'autodéfense. Cette avancée technologique repose sur le concept de "force de Laplace", où un courant électrique de forte intensité circule entre deux rails conducteurs, générant un champ magnétique qui propulse un projectile à une vitesse élevée. Ce test constitue une première mondiale, et le canon électromagnétique japonais aurait une puissance d'au moins 5 mégajoules, permettant de lancer des projectiles de 40 mm à une vitesse de 2 230 m/s, soit Mach 6,5. Les prochaines étapes visent à augmenter cette puissance à 20 mégajoules.
Le Japon s'intéresse à cette technologie depuis les années 1990, mais un projet concret n'a émergé que récemment, avec un objectif de défense aérienne et de lutte anti-surface. Le développement de canons électromagnétiques présente divers avantages, notamment l'absence de stockage d'explosifs et des coûts de tir réduits par rapport aux missiles. Cependant, cela implique de relever des défis technologiques liés aux matériaux, au guidage et à la production d'énergie.
En parallèle, la Commission européenne a accordé un financement de 15 millions d'euros au projet THEMA (TecHnology for Electro-Magnetic Artillery) dirigé par Nexter/KNDS pour développer un canon électromagnétique, en coopération avec l'Institut de recherches franco-allemand de Saint-Louis (ISL). L'objectif est de faire face aux nouvelles menaces, notamment les missiles hypervéloces. Un démonstrateur est prévu pour 2028.
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