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La formation des agents de sécurité privée

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Bienvenue dans Defense Zone, le Podcast qui traite des questions de défense et de sécurité à travers des entretiens avec des militaires, des membres des forces de l'ordre, des personnalités politiques, ou encore des entrepreneurs.

L'objectif de cette émission audio disponible sur toutes les plateformes en ligne de Podcast est d'ouvrir au grand public les portes d'un univers d'ordinaire plutôt secrets, dans le but de donner à réfléchir à des questions qui nous concernent tous, quelles soient politiques, géopolitiques, économiques ou plus largement sociétales.

Après Jess Plaiter, CEO de Terrang MP Sec France, nous partons à la rencontre d'un autre ancien légionnaire devenu entrepreneur à succès. Cette semaine, nous vous présentons l'inspirant parcours de Tibor Vass. Cet ancien commando para du 2e régiment étranger de parachutistes est le fondateur du groupe LPN, une société de conseil, de sûreté / sécurité et de soutien opérationnel en France et à l'international. Avec lui, nous allons parler du monde peu connu de la sécurité privée et parler des enjeux de cette industrie en plein essor.

 

 

Présentation

Tibor Vass est marié et père de quatre enfants. Ancien militaire, il a passé dix ans au 2e REP (régiment étranger parachutiste) de la Légion Etrangère, dont cinq ans au sein du groupe commando parachutiste (GCP). « Légionnaire un jour, légionnaire toujours », souligne l’ancien sous-officier qui reste très attaché à la Légion malgré son départ de l’institution en 2008. Ainsi, la société qu’il crée en 2009 reprend les premières lettres de la devise des bérets verts : Legio Patria Nostra devient LPN, le groupe de sécurité privée dont il est le fondateur. Son passage au sein de l’armée française l’a fortement marqué, et il éprouve une grande reconnaissance : « je suis arrivé en France en 1998, avec cinq deutschmark en poche. Aujourd’hui j’ai une société, des biens immobiliers, une maison, une famille. Tout ça grâce à la Légion Etrangère et grâce à la France bien sûr. » D’origine hongroise, Tibor a reçu l’identité française par son passage à la Légion. « Je suis devenu français et j’adore ce pays », ajoute-t-il.

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L’entreprenariat après la Légion Etrangère

Le choix de la sécurité privée

Lorsqu’un légionnaire quitte l’armée, il participe obligatoirement à un stage de reconversion d’une à deux semaines afin d’apprendre à rédiger un CV, chercher un emploi etc. A son époque, Tibor remarque que la sécurité privée représentait déjà quatre milliards d’euros de chiffre d’affaires en France. Malgré ce montant déjà élevé, le secteur souffrait pourtant d’un manque d’effectifs. De ce simple constat, il se lance dans ce domaine, « avec 1000€ de capital social, dans un sous-sol de 20m2 sans fenêtre », précise-t-il. Grâce à son travail, son sérieux et un peu de chance, sa petite entreprise est devenue une holding avec 2,5 millions d’euros de capitales, employant 250 personnes et possédant des filiales en France et à l’étranger.

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Les atouts du légionnaire

Si auparavant être un ancien légionnaire n’était pas toujours bien perçu, à cause des préjugés que ce statut propage, c’est aujourd’hui devenu un atout. Tibor estime que la Légion apporte de grandes valeurs à ses soldats : « venir d’un autre pays, dont la langue est différente, demande beaucoup de courage et de la débrouille. » Les légionnaires doivent également faire preuve d’une grande capacité d’adaptation, de travail, et nombre d’entre eux ont l’envie d’innover, de tester, de détourner l’usage d’un matériel afin d’en augmenter son efficacité. Ainsi, ces qualités sont utiles au militaire qui souhaite entreprendre après la Légion Etrangère, comme Tibor Vass ou Jess Plaiter (que nous avons reçu dans un précédent podcast). Les deux anciens légionnaires ont d’ailleurs échangé lorsque Tibor a créé sa société, Jess lui donnant des conseils car lui-même avait monté Terrang MP-Sec depuis quelques années et pouvait lui partager son expérience.

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Les qualités du Groupe commando parachutiste

Tibor rappelle que la Légion Etrangère compte environ 10 000 hommes, dont 1 200 parachutistes sélectionnés parmi les meilleures recrues après leur formation à Castelnaudary. Parmi eux, une autre sélection a lieu afin de choisir « les meilleurs des meilleurs » pour intégrer le groupe commando parachutiste (GCP). Cette petite unité de forces spéciales est composée de soldats très entraînés travaillant derrière les lignes ennemies (embuscade, surveillance…) Leur niveau est élevé et selon l’ancien commando, le passage par les GCP « donne le courage de faire les choses que d’autres n’oseraient pas faire », un aout indispensable pour un entrepreneur.



Le groupe LPN

Présentation du groupe LPN

La société de Tibor Vass a « la particularité d’avoir toutes les autorisations en France pour travailler dans le domaine de la sécurité, dans tous ses secteurs d’activités, que ce soit la mise en place de prestation de services ou la formation des agents », résume-t-il. Par ailleurs, son école de formation, l’Institut français de sécurité, est « la première en France à être autorisée, aussi bien par le Ministère de l’Intérieur, l’Education Nationale et le Ministère du Travail, à former des agents de sécurité armés»

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Le groupe intervient en France mais peut également être déployé à l’international selon les demandes, ce qu’il a déjà fait dans une quarantaine de pays. Le fondateur de LPN précise tout de même que pour être autorisé à travailler sur le sol étranger, il doit posséder une filiale dans le pays concerné.

 

Partir de zéro

L’ancien militaire admet la complexité de passé à cette seconde partie de carrière alors qu’il ignorait tout du fonctionnement d’une société en France et des subtilités administratives françaises. Mais selon lui, la plus grosse difficulté a été la différence d’état d’esprit entre le monde militaire et civil, dans lequel il ne retrouvait pas certaines valeurs de la Légion Etrangère. Il lui a fallu une période d’adaptation afin de revenir dans ce monde civil, qu’il ne qualifie « ni de positif, ni de négatif, mais qui n’a rien à voir avec ce qu’on a vécu. »

 

Le management au sein du groupe

Parmi les avantages à être passé par l’armée et notamment par la Légion, Tibor met en avant la maitrise du commandement, et donc du management dans son entreprise : « si tu sais manager 150 nationalités, tu sais manager 250 hommes », considère-t-il. « Je ne fais que dupliquer ce que j’ai vu dans la Légion Etrangère, et ça marche très bien. » Les valeurs d’exemplarité, d’honnêteté et d’exigence avec soi-même qu’il a apprise chez les képis blancs sont un atout pour lui, car « si tu es exemplaire, les gens vont te respecter », explique-t-il.

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L’image de la sécurité privée

Evolution des mœurs depuis 2015

Tibor estime qu’il y a onze ans, l’ancien militaire était considéré comme « trop carré » ; or, depuis 2015, c’est désormais devenu un atout, et une qualité recherchée, notamment dans le domaine de la sécurité. La demande en sécurité privée a augmenté depuis les attentats car, selon le gérant de LPN, les gens ont compris son importance et le fait que les forces de l’Etat ne pouvaient pas être partout.

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En 2017, la loi évolue et les agents de sécurité peuvent être armés. Le rapport à l’armement en France est toutefois encore tabou, explique Tibor, alors que le pays est dans le trio de tête en termes d’exportations d’armes dans le monde. Les armes continuent à avoir une mauvaise image, alors que « face à un méchant armé, il faut un gentil armé », résume Tibor avec pragmatisme.

 

La nécessité d’avoir des armes

« Depuis que l’Homme est sur Terre, il a toujours fabriqué des armes, pour se défendre ou attaquer. Ce n’est pas l’arme qui tue, c’est celui qui est derrière l’arme », avance Tibor, qui juge « utopique » de ne plus vouloir d’armes du tout. En effet les unités d’intervention comme le RAID ou le GIGN « ne peuvent pas être partout », et il faut alors des primo-intervenants comme les policiers municipaux, formés et armés

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L’ancien légionnaire évoque le cas de la Suisse, qui statistiquement, possède autant d’armes à feu par habitant que les Etats-Unis, pour que chacun puisse défendre le pays en cas d’attaque. Il n’y a pourtant dans ce pays pas de fusillade ou de problème avec les armes, car les formations sont réalisées régulièrementLa question pour Tibor Vass est donc l’utilisation de l’objet qui peut être dangereuse, plus que l’objet en lui-même, car un couteau, une lance ou une voiture peuvent aussi faire des dégâts.

 

 

La formation et l’armement des agents privés

L’armement depuis 2017

Tibor rappelle qu’une arme peut désigner de nombreux objets différents et pas seulement une arme à feu. « Il existe aussi les armes non létales », explique-t-il, « qui permettent de neutraliser quelqu’un : bâton télescopique, tonfa, gazeuse… Pour les policiers c’est aussi le taser, le flashball… Ce sont des armes, mais qui ne sont pas faites pour tuer. » La loi de 2017 a permis aux agents de sécurité de pouvoir s’équiper en armes, létales ou non létales selon leurs qualifications.

 

La formation du groupe LPN

Pour débuter la formation d’agent de sécurité, le candidat n’a pas besoin de diplôme mais doit détenir une carte professionnelle délivrée par le CNAPS, et donc déjà travailler dans ce milieu. Il doit effectuer une deuxième demande auprès du CNAPS afin de démarrer la formation, après avoir subi une enquête poussée.

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La formation se compose d’un tronc commun de quatre semaines (diplôme de catégorie D) permettant de travailler avec des armes non létales, puis de deux semaines supplémentaires pour utiliser des armes létales. Le diplôme comprend plusieurs matières : secourisme tactique, techniques opérationnelles (équivalent du TIOR de l’armée), conception de sûreté/sécurité, gestion du stress, armes de poing…

Une formation est dispensée chaque mois à une section de douze agents maximum. « Nous ne visons pas la quantité, mais la qualité, l’excellence », souligne le fondateur de LPN.

 

Les débouchés de la formation

Tibor Vass cite quelques exemples de contrats qu’il a pu signer, avec des parcs d’attractions ou encore avec l’armée. En effet, la sécurité du quartier Balard à Paris sera désormais assurée par ses agents armés au lieu des gendarmes. Il explique que de plus en plus de postes s’ouvrent, et pense que la sécurité privée va se généraliser, notamment si l’Etat, comme à Balard, montre en l’exemple. Cela créerai alors des emplois, et permettrait de libérer les forces de l’ordre pour autre chose, surtout que ce type de missions (protection statique d’un bâtiment, opération Sentinelle…) n’est pas forcément appréciée des engagés qui « ont signé pour faire de l’offensif, pas du défensif ». Il n’est d’ailleurs « pas favorable » à ce que des agents de sécurité privée puissent un jour mener des opérations comme les militaires ou les forces de l’ordre. « Ce sont des missions régaliennes, ce n’est pas notre mission », insiste-t-il. Le gérant du groupe LPN.

 

Salaire et coût de la formation

La formation du groupe LPN coûte au total 4900€ pour les deux diplômes : 2600€ pour la catégorie D et 2300€ pour la catégorie B.

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Le salaire minimum est de 1800-2000€ net par mois, pour 40h par semaine environ (soit 180h par mois). Une prime de risque peut s’ajouter, selon la société employeuse et le site, certains étant plus dangereux que d’autres. « C’est normal qu’à partir du moment où tu donnes des armes à quelqu’un, ce n’est pas le même risque ni les mêmes responsabilités », assure Tibor, « et il faut avoir le salaire qui va avec. » Il met toutefois en garde contre l’image du mercenaire qui gagnerait des millions d’euros en travaillant partout dans le monde. S’il admet que certains ont beaucoup gagné à l’époque en Irak, il met l’accent sur les très grands risques que ceux-là ont pris, et aussi sur le nombre de morts que la profession a connue. 



Derniers conseils

Si l’aventure entrepreneuriale de Tibor Vass est un succès, il conseille toutefois de bien étudier la question avant, notamment « la gestion d’une société car ce n’est pas « j’achète, je revends et je gagne de l’argent », ce n’est pas aussi simple que ça. » Il faut également avoir beaucoup de pragmatisme, et « ne pas dépenser plus que ce que tu gagnes. » Cependant, l’entrepreneur encourage toux ceux qui voudraient se lancer : « quand on a envie de le faire, il faut le faire. Il faut essayer. Et même si ça ne marche pas, c’est une expérience. » Il indique enfin la nécessité d’avoir un peu de fonds de côté, car une entreprise n’est pas rentable immédiatement mais a des frais.

 

Vous pouvez retrouver notre rencontre avec Tibor Vass et un dossier spécial sur la Légion étrangère dans notre nouveau numéro de Défense Zone en suivant ce lien ou en cliquant directement sur l'image.

DZ 6, Légion étrangère,


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