Assez peu connu du grand public, le concept de subversion se présente comme un levier de la stratégie d’influence militaire visant à faire s’effondrer une société de l’intérieur sans recourir, au départ, à la force cinétique. Décortiquons les mécanismes — de la démoralisation à la « normalisation » — à travers la matrice décrite par Yuri Bezemenov et examinons leur résonance dans les stratégies contemporaines, y compris en France.
Texte : Hyacinthe-Bernard IBERT
Le philosophe américain Will DURANT (1885-1981) a dit : "une grande civilisation n'est conquise de l'extérieur que si elle s'est détruite de l'intérieur". Par cette citation, il mettait en exergue la pensée de Sun-Zu qui érigeait l’art de remporter la victoire sans avoir à entamer le combat comme le raffinement de la stratégie. En effet, annihiler un adversaire en l’amenant à se détruire lui-même de l’intérieur relève de la subversion, laquelle est une déclinaison possible de la stratégie d’influence militaire. Comme l’indique sans ambiguïté son étymologie latine subvertere, "mettre sens dessus dessous ; bouleverser, détruire", la subversion est effectivement un processus utilisé lorsqu’un belligérant souhaite détruire son ennemi de l’intérieur, sans recourir à une force cinétique, même si une action de coercition militaire traditionnelle peut-être envisagée, si besoin, sur un très bref moment à la fin du processus global de subversion pour provoquer l’effondrement total de la cible.
En son essence, la subversion vise à bouleverser tout ce qui puisse avoir de la valeur au sein du pays visé jusqu’à ce que la perception de sa population devienne si éloignée de ses valeurs initiales que le pays assaillant n’apparaît plus du tout comme un ennemi. Dans le cadre d’une manœuvre subversive réussie, le pays cible en vient même à le considérer in fine comme un libérateur dont le système de valeurs, la vision et les ambitions géopolitiques et la civilisation sont une alternative viable, souhaitable et une potentielle solution à la situation dans laquelle sa population se trouve à ce moment précis...
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