La musique de la Légion étrangère
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Cette semaine Défense Zone a rencontré le lieutenant-colonel Émile Lardeux, chef de la musique de la Légion étrangère depuis 2008. Cette musique, célèbre pour ses prestations chaque année à l'occasion du défilé sur les Champs-Élysées est aussi la seule musique militaire à avoir obtenu un disque d'or.
Le chef de musique
Le chef de musique hors classe (équivalent de lieutenant-colonel) Émile Lardeux est le chef de la musique de la Légion étrangère depuis 2008.
Après son service militaire à la 3e région militaire, il passe le concours de sous-chef de musique. De 1986 à 1988, il suit une instruction au conservatoire de musique militaire de Rueil-Malmaison. En 1988 il est affecté à la musique militaire du 92e régiment d’infanterie (Clermont-Ferrand) où il sert pendant sept ans avant d’être affecté pour trois ans à la musique du 27e régiment d’infanterie de Dijon. De 2005 à 2008, il occupe le poste de chef de musique à Rennes avant d’être affecté à l’été à Aubagne pour prendre la musique de la Légion.
Comment devenir musicien à la Légion étrangère ?
Actuellement 80% du recrutement des musiciens se fait au moment de l’engagement. Lors des tests de recrutement et en fonction du passé des futurs engagés, il peut leur être proposé de rentrer dans la musique de la Légion. S’ils sont volontaires, des tests seront effectués pour définir leur capacité technique à intégrer la musique.
En parallèle, 20% sont des légionnaires cooptés par des musiciens en place. Ils prennent contact avec leur camarade déjà intégré, proposent leur candidature et en fonction des places disponibles sont auditionnés et peuvent ensuite intégrer la formation.
Musiciens ou légionnaires ?
Le jeune qui s’engage pour entrer dans la musique de la Légion étrangère va devoir suivre le même cursus de formation que ces camarades appelés à servir en unité de combat. Pendant les quatre premiers mois, il est affecté à Castelnaudary pour suivre les classes avant la célèbre marche au Képi. Ce n’est qu’une fois cette formation terminée qu’il pourra intégrer la formation musicale. « Ils sont légionnaires avant tout », insiste le LCL Lardeux. D’ailleurs pendant plusieurs semaines chaque année, les légionnaires reprennent un entraînement purement militaire : marche, tir, etc. Cette année, les légionnaires de la musique participeront à la mission Sentinelle pendant un mois.
De plus, suivant les situations, ils peuvent participer au service au sein de leur unité : la compagnie de commandement et de service du 1er régiment étranger? Ainsi, pendant le confinement, la musique de la Légion étrangère montait les gardes et d'autres services fautes de prestations et de répétitions possibles. D’habitude la musique n’est pas soumise aux services, car déjà très contrainte par le nombre de prestations annuelles.
La diversité des musiciens légionnaires
La Légion est une arme par tradition très multiculturelle. C’est aussi le cas de la musique de la Légion étrangère. Si 90% de l’encadrement sont des sous-officiers d’origine russe, aujourd’hui d’autres nations émergent au sein de la musique. Le Brésil est une nation de plus en plus représentée, mais on y trouve aussi un Népalais, trois Mongols ou deux Colombiens. Au total la musique de la Légion étrangère aligne 15 nations différentes pour 62 musiciens. Mais la cohésion ne pose pas de problème pour l’officier supérieur : « Ils sont unis par la fierté d’être légionnaire et l’universalité de la musique ».
Quelles sont les prestations de la musique de la Légion étrangère ?
Le premier employeur de la musique est le général commandant la Légion étrangère. Il sollicite la musique pour les prises d’armes officielles comme celle de la fête de la légion le 30 avril pour célébrer la bataille de Camerone, mais aussi pour l’accueil des autorités militaires et civiles au sein du régiment d’Aubagne.
Les musiciens sont aussi appelés pour les fêtes de saints patrons d’armes dans les autres régiments de la Légion étrangère comme pour Sainte-Barbe chez les sapeurs ou Saint-Georges dans la cavalerie. C’est aussi un outil de rayonnement extérieur pour le général COMLE lors de grandes prestations civiles (compétitions sportives, etc.)
Pour les prestations internationales ou dans d’autres régiments hors légion, la musique de la Légion étrangère dépend du cabinet du chef d’état-major de l’armée de Terre. Les musiciens ont joué dans une soixantaine de pays avec parfois des moments forts comme jouer sur la place rouge « un souvenir particulier pour certains de mes musiciens qui, quelques années auparavant défilaient sur cette même place en tant que militaires russes ». « C’est aussi le souvenir de serrer la main à la reine d’Angleterre après un concert au château de Windsor ». Mais pour l’officier un des moments les plus marquants restera cette prestation au Mexique à l’occasion de la fête nationale de l’indépendance « Nous avons vécu ce voyage comme un véritable honneur, une chance, un privilège. D’autant plus que nous avons eu l’autorisation de nous rendre sur le site de la bataille de Camerone qui est le lieu le plus emblématique de tous les légionnaires. »
La journée d’un musicien légionnaire
Comme tous les militaires, les légionnaires commencent la journée par une séance de sport.
Ensuite la deuxième partie de la matinée est occupée par deux heures de répétitions. L’après-midi commence par des exercices d’ordre serré et de défilé avant de reprendre le travail par pupitre et avec des professeurs. Quotidiennement des cours de français sont donnés pour les légionnaires non francophones. Le soir, contrairement à d’autres formations militaires musicales, la plupart des légionnaires dorment au quartier. Ils sont soumis au même régime que les autres militaires, comme ne pas avoir de compte en banque, de voiture d’appartement ou l’interdiction de se marier les cinq premières années.
L’aura de la musique de la Légion auprès des civils
Pour le colonel, ce succès tient déjà du fait que ce soit des légionnaires. « Les gens sont curieux et surpris quand je présente chacun de mes musiciens après chaque prestation, ils se rendent compte de la diversité des origines. Et puis il y a le 14 juillet, nous y sommes chaque année et souvent interviewés par les différentes chaînes de télévision. Grâce à cela, beaucoup de français connaissent la musique de la Légion étrangère. Nous ne sommes peut-être pas techniquement la meilleure musique militaire, mais nous sommes la plus belle », plaisante le LCL Lardeux.
La musique au disque d’or
En novembre 2012 la musique de la Légion étrangère donne une aubade à la Cathédrale des Invalides à Paris. À l’issue de la prestation une représentante d’Universal musique vient voir le lieutenant-colonel pour lui présenter le président de Deutsch Grammophon : Mark Wilkinson. « J’étais un peu abasourdi et surpris, avoue l’officier. J’avais en face de moi le président du plus prestigieux label de musique classique qui m’annonce vouloir enregistrer notre formation ». Quatre mois plus tard, c’est chose faite et leur CD de musique est mis en vente pour la première fois à l’occasion de la fête de Camerone en avril 2013. C’est un succès immédiat. À la fin du défilé sur les Champs-Élysées la même année, on remet au LCL le disque d’or de son album. « C’était fou et tellement émouvant. Nous sommes devenus en quelques mois la meilleure vente de musique militaire et nous sommes encore aujourd’hui la seule formation militaire à avoir obtenu cette prestigieuse récompense. »
Que deviennent les légionnaires musiciens ?
Les légionnaires de la musique de la Légion étrangère sont avant tout des militaires. Certains y restent pendant de nombreuses années, d’autres souhaitent rejoindre les unités combattantes. « Je n’oblige personne à rester contre son gré. Mais comme tout légionnaire, ils obéissent aux ordres donnés et aux besoins de la Légion étrangère. Certains souhaitent rejoindre des régiments, mais j’ai encore besoin d’eux avant de renouveler mes effectifs. Nous passons alors un accord moral qui les lie à la musique encore quelques mois ou années et dès que je peux leur permettre de partir je le fais avec plaisir. D’autres reviennent aussi après quelques années en compagnie de combat. C’est la force de cette musique, sa diversité et sa fierté d’être une des images de la Légion étrangère, chacun de mes soldats en est pleinement conscient. »
Pour en savoir plus sur la Légion étrangère, vous pouvez lire notre article sur le site de Défense Zone en suivant ce lien ou en cliquant directement sur l'image.
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