Micka Illouz, podcast DZ

La pratique des arts martiaux avec Micka Illouz

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Bienvenue dans Defense Zone, le Podcast qui traite des questions de défense et de sécurité à travers des entretiens avec des militaires, des membres des forces de l'ordre, des personnalités politiques, ou encore des entrepreneurs.

L'objectif de cette émission audio disponible sur toutes les plateformes en ligne de Podcast est d'ouvrir au grand public les portes d'un univers d'ordinaire plutôt secrets, dans le but de donner à réfléchir à des questions qui nous concernent tous, quelles soient politiques, géopolitiques, économiques ou plus largement sociétales.

Cette semaine, nous avons rendez-vous avec Micka Illouz, un expert des questions de sûreté et de la protection personnelle. Après un passage dans l'armée de terre et notamment une unité opérationnelle des services spéciaux, il est désormais enseignant d'arts martiaux et instructeur de tir. Avec lui, nous allons parler entre autres de self-defense et de sécurité personnelle.

 

 

Présentation de Micka Illouz

Micka Illouz, 37 ans, enseigne les arts martiaux, le tir (qu’il considère d’ailleurs comme un art martial), la self-defense et la sécurité personnelle. Après un passage par l’armée, il a eu envie de partager ses connaissances et a commencé à enseigner. Il était à l’époque l’un des plus jeunes de son académie. Passionné par le combat réel et avec ce goût de la transmission, il trouve au fur et à mesure un intérêt à « enseigner en écrivant aussi ». C’est ainsi qu’il a écrit deux livres et est très actif sur les réseaux sociaux.

Micka Illouz,



La formation par d’anciens opérateurs

Les qualités du formateur

Micka n’est pas le premier ex-militaire que nous recevons qui choisit l’entreprenariat dans le domaine de la formation après avoir quitté l’armée. Si l’ancien opérateur trouve cela « positif » il ajoute tout de même que les formations délivrées doivent être « plausibles et adaptées au monde civil. » Il regrette en effet que certains formateurs soient trop proches de techniques militaires et qui « entretiennent chez les civils le fantasme du militaire forcément très bon au corps-à-corps et au tir. » La pédagogie est également un atout indispensable. « Un bon combattant n’est pas forcément un bon enseignant », remarque Micka. Celui-ci ajoute enfin qu’il faut avoir un minimum de recul sur l’enseignement, éviter trop de rigidité mais au contraire être ouvert d’esprit pour chercher des compétences dans d’autres sports, ressources ou personnes.

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La sous-traitance des institutions

Lara Tactical ou Alex French SAS avaient déjà évoqué la sous-traitance des formations étatiques, que ce soit celles des forces de l’ordre ou celles de certaines unités de l’armée. Micka reçoit lui aussi des policiers ou gendarmes souhaitant continuer à progresser, mais n’ayant que peu de séances de tir par an. Il constate aussi un « manque de culture de l’arme en France » ce qui implique que les forces de l’ordre sont moins au courant des dernières nouveautés.

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L’armée également connaît des évolutions, mais d’une autre nature : « pour le combat au corps-à-corps ou le tir, il n’y a pas des milliards de manières de faire la chose », note l’instructeur, « ce qui change c’est la technologie, l’équipement» Avec l’amélioration et la récurrence du port de protection balistique, la posture des soldats est aussi modifiée. Il note toutefois une évolution sur les sports de combat dans les armées, améliorés et adaptés en fonction des retours d’expérience notamment après l’Afghanistan : « on a gagné en pragmatisme. Avant, on avait tendance à cocher des cases », explique-t-il en pensant aux notices de combat.



L’engouement pour le self-defense

Les périodes de paix ont toujours été marquées, selon Micka, par l’entretien de pratiques « plus valables, ou qui marchaient mais sans qu’on sache l’expliquer. » Il relève alors que des techniques sont enjolivées au détriment de l’efficacité ou de la praticité, en citant le « coup de pied sauté » en exemple. Cependant aujourd’hui, l’enseignant en art martial assure que les formations sont davantage tournées vers le pragmatisme afin d’éviter le « mytho ».

L’engouement pour les sports de combat est aussi transmis par le cinéma notamment les blockbusters. « Ça donne envie certes », explique Micka qui est fan de films d’arts martiaux depuis tout petit, « mais j’ai vite compris que ce n’était pas comme ça dans la vraie vie. » S’il trouve qu’aujourd’hui les films sont globalement plus réalistes, il existe aussi certaines productions tels Jason Bourne ou John Wick, dans lesquelles le personnage principal a un niveau de compétence très élevé mais « inaccessible ». Ces films entretiennent aussi le fantasme d’intégrer les forces spéciales pour atteindre cette capacité.

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D’un autre côté, même si l’image du héros qui saute, plonge, court, tire partout et s’en sort vivant est encore forte, Micka estime que « les gens ont compris que c’était du spectacle » et de plus en plus de personnes s’inscrivent à des écoles de cascade. Mais là encore, la génération de jeunes qui « regardent beaucoup les médias et jouent à des jeux-vidéos » idéalisent parfois ce métier ou la pratique des arts martiaux, qui sont loin d’être évidents : « j’ai commencé très jeune, je suis pas mal abimé. J’ai une expérience de vie en dehors même de l’armée qui était assez compliquée, tout comme ma jeunesse. J’ai beaucoup vécu à l’étranger, avec mes parents ou tout seul, pour la pratique des arts martiaux. Il faut être prêt à payer le prix », conclut Micka.



Le rapport à la violence

Une désinhibition

« La France dans laquelle on vit est très peu violente paradoxalement à ce qu’on voit », souligne Micka pour qui « on est déshabitué de cette violence, donc elle fait peur. Il n’y a pas si longtemps de ça, on emmenait des gens voir des exécutions publiques. »

Il rappelle la loi de proximité, qui fait qu’un meurtre en bas de chez nous sera qualifié de « barbarie » alors qu’un attentat qui aura fait quinze morts à Kaboul sera plus insignifiant dans notre inconscient, « parce que c’est loin de nous. » Il évoque également la négation de l’empathie, où un être humain sera moins traumatisé par une catastrophe naturelle qui fait potentiellement beaucoup de morts, que par un attentat dans une grande ville, car « le fait que ce soit fait par un autre être humain est traumatisant. » De plus, ce genre d’acte rappelle aux gens « leur propre faiblesse » et leur montre qu’ils n’ont peut-être pas les capacités de traiter cette violence-là.

 

Garder son sang froid

Micka assure que la montée d’adrénaline qu’on ressent face à un acte violent est « humain » mais fortement désinhibée en Europe occidentale. « Tu vas dans les pays de l’est, tu n’arrives pas à tes 18 ans sans avoir connu de bonnes bagarres », note l’ancien militaire, qui a un rapport à la violence bien spécifique. « Je ne considère pas la violence comme quelque chose de forcément péjoratif », exprime-t-il, « c’est une contrainte exercée sur une personne ou sur une chose. La violence n’est pas forcément physique d’ailleurs, elle peut être psychologique. » Micka explique toutefois que cette violence, parfois nécessaire, doit toutefois être maîtrisée et jamais injuste : « lors de mes cours, je fais prendre conscience de ce qu’est la violence, mais qu’elle doit être exercée avec quelque chose de droit. L’injustice est inacceptable. »



La pratique du combat

Les signes d’une attaque imminente

Micka liste ensuite certains éléments qui annoncent une attaque physique. Il évoque tout d’abord la posture et la manière de se placer d’une personne qui se rapprocherait, suffisamment près pour frapper. Puis il parle du discours agressif qui peut être utilisé pour « sidérer sa victime », du transfert de poids ou encore de la rupture dans le regard qui indique une rupture d’empathie. Face à ces signes, Micka propose deux solutions : remettre de la distance pour gagner du temps, ou frapper le premier. « Je suis beaucoup plus sensible à l’attaque qu’à la menace », renchérit-il, en expliquant qu’il faut s’entraîner à ne pas prendre le premier coup, mais toujours répondre de manière proportionnée.

 

Ne pas être empathique

Micka a eu l’occasion de travailler pour certaines unités spécialisées et a remarqué la nécessité de rompre l’empathie pendant les entraînements, afin d’améliorer le réalisme du combat et la mise en condition. « C’est difficile mais c’est ce que j’apprends en premier à mes élèves, car ce n’est pas rendre service aux autres », ajoute-il en évoquant les combats « entre potes » où celui qui attaque rigole.

Micka Illouz, Greg MMA

 

Apprendre à se connaître

Les arts martiaux sont très formateurs sur plusieurs points. « La confrontation nous apprend beaucoup sur nous-mêmes, nous fait réfléchir sans nous mentir », indique Micka, « qu’elle soit un échec ou une réussite. » Chaque sport de combat est une expérience selon lui, et il est intéressant de mélanger plusieurs disciplines, certaines plus techniques et d’autres plus au corps-à-corps. Il ne sera pas possible dans le cadre d’un entraînement d’être confronté à de la vraie « malveillance, méchanceté », d’être réaliste à 100%, mais il est possible de s’en rapprocher.

Enfin, le travail collectif est « puissant, chacun se soutient », mais c’est également une difficulté dans ce groupe de « se connaître tout seul ».



Derniers conseils

Micka avertit ceux qui cherchent à se former à la self-defense de « ne pas se laisser berner ». Plusieurs éléments sont à prendre en compte : un professeur d’art martial qui ne combat pas est suspicieux ; la base est quelqu’un qui a une bonne lutte et un bon pied-poing ; l’expérience peut être relative, mais la personne doit alors avoir l’humilité de le dire. De plus, l’ancien militaire indique être méfiant des « scientifiques » qui usent et abusent de termes techniques, de connaissances justes lues etc, « car aujourd’hui c’est une mode de nourrir une compétence qu’on n’aurait pas par des connaissances. »

Micka Illouz, Défense Zone

Pour terminer, Micka ne conseille pas la self-defense à un jeune souhaitant intégrer les forces spéciales, mais une discipline d’art martial « qui va plus au contact »., comme le MMA par exemple. Il conseille également de lire les écrits d’anciens, que ça soit de la première ou deuxième guerre mondiale, ceux qui ont fait des campagnes, « pour s’ancrer dans la réalité. »

 

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