CYNO-OPS, le salon des maîtres-chiens unique en Europe

armée, chien, Gendarmerie, maitre-chien, police, salon -

CYNO-OPS, le salon des maîtres-chiens unique en Europe

de lecture - mots

Les 25 et 26 novembre, les spectateurs habituels du cinéma Pathé à Archamps, en Haute-Savoie, ont laissé la place à des dizaines d’uniformes et quelques compagnons à quatre pattes… Le salon CYNO-OPS consacré aux maitres chiens, unique en Europe, a en effet posé ses quartiers pour deux jours riches en partage et en apprentissage.

 

 

Deux gendarmes à l’origine du projet

En 2017, Laurent et Gwen, deux maîtres-chiens de la gendarmerie, ont l’idée de réunir des professionnels de leur spécialité afin d’échanger les connaissances et pratiques. C’est ainsi que naît Cynogend, le premier salon français dédié aux binômes cynotechniques. Au fil des ans, le séminaire genevois des unités K9 évolue et attire de plus en plus de monde, provenant de milieux différents. En 2020, les deux gendarmes sont rejoint par Julien et ils créent ensemble l’association Cynofamily 74, qui soutient l'évènement. En complément, Julien propose et met en place au sein de l'association l'idée d'aider les cynotechniciens de la gendarmerie à prendre soin de leur chien de travail à la retraite, période couteuse pour le maître qui doit aussi assurer la relève avec un deuxième animal. Depuis, c’est l’association qui gère le salon, lequel a d’ailleurs changé d’appellation pour se nommer Cyno-Ops.

salon, cyno-ops, organisateurs, gendarmes

 

 

Cyno-Ops, un salon hétéroclite

Cyno-Ops a donc grandi depuis sa création, et cette année la 3e édition a rassemblé plus de 250 visiteurs, parmi lesquelles des gendarmes, mais aussi des membres de la Police, des Douanes, de l’armée, de l’ERIS (Equipes régionales d’intervention et de sécurité), de la SUGE (Sûreté ferroviaire)… Le salon a aussi dépassé le cadre national, puisque des maîtres-chiens de Suisse, d’Italie, du Luxembourg, du Canada, de l’Allemagne et du Maroc ont fait le déplacement. Enfin, les forces spéciales cynotechniques sont venus en nombre, avec des représentants des forces de l’ordre (RAID et GIGN), des trois armées (Commando Kieffer pour la Marine Nationale, CPA 10 et 30 pour l’armée de l’Air et de l’Espace, 1e RPIMA pour l’armée de Terre) et de forces étrangères (Groupe tactique d’intervention du Québec, 1e et 4e régiment alpin parachutiste italien).

salon, cyno-ops, stand, exposants

La diversité était aussi de mise du côté de la douzaine d’exposants qui a posé ses stands dans le hall du cinéma. Si les maîtres-chiens ont ainsi pu faire le plein de textiles, sacs ou écussons grâce aux équipementiers présents, la majorité du matériel mis en avant étaient bien destiné aux stars de ce salon : les chiens ! Harnais, sangles, alimentation, systèmes de communication… Les visiteurs ont aussi pu découvrir quelques innovations technologiques, avec par exemple la ceinture vibratoire de Caylar qui permet de communiquer avec le chien lorsque les moyens visuels ou auditifs ne sont plus envisageables. Ou encore le tube Getxent, dont les propriétés favorisent la capture des molécules odorantes afin d’entraîner ou de faciliter la détection par les chiens (produits stupéfiants, maladie, explosifs…).

salon, cyno-ops, stand, exposant, équipement

 

 

Des conférences dédiées aux binômes cynotechniques

Les molécules odorantes, justement, ont été au centre de la première conférence délivrée lors du séminaire. Jérémy Topin, chercheur à l’université de Nice, a présenté au public le fonctionnement de l’odorat d’un point de vue physiologique, puis les facteurs influençant la dégradation de ces molécules. La gendarmerie a été tout particulièrement intéressée par son intervention, qui a permis de réaliser que l’entraînement des chiens de détection des stupéfiants n’est pas optimal s’il est réalisé avec de la cocaïne pure, contrairement aux idées reçues. Le scientifique a en effet expliqué que les chiens détectent en réalité les produits de synthèse. Ainsi, un partenariat entre gendarmes et scientifiques se profile peut-être afin de trouver une molécule commune à plusieurs drogues mais non utilisée au quotidien, ce qui rendrait les chiens plus polyvalents et efficaces dans leurs recherches.

salon, cyno-ops, conférence, chercheur, scientifique, odeur

La deuxième conférence de la journée portait également sur les capacités olfactives du chien. Le professeur Grandjean, vétérinaire, et l’équipe Nosaïs expérimentent depuis mars 2020 la détection du covid-19 par ces alliés au flair exceptionnel. Lors de l’expansion du coronavirus, le Professeur Grandjean s’est concentré sur un mot-clé, essentiel selon lui pour faire face à une pandémie : le dépistage. Le chien avait déjà fait ses preuves dans la détection de maladies infectieuses ou non ; celle du covid-19 était donc une piste à creuser. Lui et les membres de Nosaïs sont revenus sur la recherche et leur choix d’une procédure d’expérimentation, sa mise en place, les premiers tests, les évolutions, les résultats concluants… et les obstacles rencontrés aujourd’hui pour se servir de cette méthode. Sans mâcher ses mots, le Professeur Grandjean a insisté sur l’efficacité des chiens mais les difficultés juridiques pour les faire reconnaître comme « dispositif médical », étape obligatoire pour s’en servir comme moyen de détection.

salon, cyno-ops, conférence, vétérinaire, covid, détection

Le lendemain a laissé la place devant la salle aux forces spéciales. Tout d’abord, le Colonel Thierry Lamour, vétérinaire au sein des armées, a présenté le projet « Arcane » dont il est à l’origine. Il est revenu sur l’historique et la fabrication du premier prototype d’un casque canin permettant au binôme cynotechnique d’effectuer un saut opérationnel à très grande altitude. A cette hauteur, le chien a lui-aussi besoin d’un casque apportant de l’oxygène. L’équipe montée par le vétérinaire a ainsi relevé le défi de construire un casque adapté à la morphologie canine, adaptable sur un masque à oxygène humain, parfaitement étanche, solidement fixé et permettant au chien de respirer correctement. Après plusieurs phases de tests, le 12 novembre 2020, Pablo, militaire au sein du CPA 10, et son chien, sautent à 8000m d’altitude grâce au dispositif « Arcane » et inscrivent une première mondiale.

salon, cyno-ops, conférence, vétérinaire, arcane, saut opérationnel

Après la composante Air, des militaires de la Marine Nationale et plus précisément des maîtres-chiens du commando Kieffer, ont décrit l’histoire, l’organisation et les missions de la FORFUSCO, la force maritime des fusiliers marins et commandos. Ils se sont notamment attardés sur l’emploi des capacités K9 lors des opérations qu’elles soient terrestres, aéroportées, aérolarguées ou nautiques. Le chien peut par exemple nager 500 mètres avec son maître pour rejoindre un rivage lors d’une infiltration, bien qu’en situation réelle cette distance sera réduite à quelques dizaines de mètres afin de ne pas épuiser le chien pour la suite de la mission.

salon, cyno-ops, conférence, commando marine, forfusco

Un opérateur du GIGN a achevé cette matinée riche en forces spéciales en présentant le groupe appui cynophile et en mettant en avant sa spécialité, le « dirigement ». Grâce à une radio portée par le chien, le maître peut communiquer à distance avec lui. En complément, une caméra intégrée au casque canin permet un retour sur écran de ce que voit le chien. Celui-ci peut donc être envoyé pour de la reconnaissance de lieux en autonomie mais guidé par son opérateur.

salon, cyno-ops, conférence, GIGN, gendarmerie, dirigement

Enfin, pour clore ce cycle de conférence, le Docteur Autier-Derian est intervenu dans le domaine de l'éthologie. La vétérinaire comportementaliste travaille aujourd'hui au bureau d'études Animal Walfare Consulting et est référente nationale au Service de Santé des Armées. Son parcours l'a d’abord amené à étudier de nombreux sujets tels que l’impact de l’espace clos et restreint ou celui des changements d’environnement radicaux sur les animaux. Si sa thèse était portée sur les primates, le public a rapidement compris le lien avec leur profession et les conditions de vie de leur binôme à quatre pattes. Après avoir détaillé l’histoire et la définition de l’éthologie, la vétérinaire s’est d’ailleurs attardée sur les caractéristiques du chien de travail. La compréhension du fonctionnement de leurs sens permet aux maîtres-chiens d’être plus efficace dans l’entrainement et le travail de leur animal. Pour finir, le Docteur Autier-Derian a sensibilisé le public au mode de vie contraignant auquel le chien est confronté. Un chien militaire par exemple, peut se sentir seul et frustré au retour d’une opex, alors que son maître est en repos, et lui se retrouve du jour au lendemain seul au chenil. Sans volonté de blâmer les maîtres-chiens, l’objectif de la vétérinaire était plutôt la prise de conscience afin de faire évoluer les comportements ou au moins pousser à la réflexion sur la manière d’améliorer la vie des chiens. Elle explique ainsi que ceux-ci sont soumis à des périodes de stress ou de frustration qu’il faut identifier pour mieux prendre en charge.

salon, cyno-ops, conférence, vétérinaire, éthologie

 

 

Des démonstrations à succès

Une démonstration impressionnante a éprouvé la technologie inédite de "dirigement". Nitrate, le malinois du GIGN venu pour l’occasion, a fait l’unanimité dès les premiers instants. Le dispositif mis en place sur sa tête, le chien attentif est tourné vers son maître et attend les ordres. Le gendarme l’envoie dans un premier temps à différents endroits de la salle, le faisant monter et descendre des escaliers latéraux. Dans un second temps, le berger belge est envoyé en reconnaissance dans les toilettes du couloir, en dehors du champ de vision de son maître, puis dans le hall du cinéma. « Douma. Sit. A gauche. Douma… », les mots se succèdent et le chien obéit aux ordres chuchotés par radio à son oreille, bien que les conditions de bruit et de monde diffèrent de son entraînement habituel. Enfin, dernière phase de la démonstration, le maître-chien déploie son équipier à l’extérieur du bâtiment. Les quelques flocons qui commencent à tomber ne perturbent en rien le chien, qui continue d’exécuter avec précision et rapidité la mission confiée. Revenu auprès de son maître, c’est sous un tonnerre d’applaudissements que se termine la présentation de cette spécialité du GIGN, unique en France.

salon, cyno-ops, démonstration, GIGN, gendarmerie, dirigement

Une autre démonstration a soulevé la curiosité du public, celle de l’équipe Nosaïs. Après leur conférence traitant de la détection du covid-19 par les chiens, la théorie cède la place à la pratique. Six cônes sont alignés contre le mur du couloir. Lors de la première phase, un leurre conçu par l’Institut Pasteur est disposé parmi les cinq échantillons négatifs. La deuxième phase est réalisée en condition réelle avec six échantillons récoltés auprès de volontaires du public. A chaque fois, deux binômes réalisent tour à tour un passage, afin de renforcer la fiabilité du test. Sur la première phase, le leurre est détecté immédiatement par les chiens ; la deuxième quant à elle rassure plutôt les participants, puisqu’aucune trace de virus n’est détectée !

salon, cyno-ops, démonstration, détection, covid

 

 

Après deux jours intenses d’échanges, de conférences et de démonstrations, chacun repart dans son unité, aux quatre coins de France ou par-delà les frontières. Après deux ans sans salon à cause du covid, cette édition a rassemblé un nombre de professionnels et de passionnés du monde cynophile plus élevé que les années précédentes. L’objectif, pour les prochaines éditions, viser encore plus grand et plus international ?

 


Laissez un commentaire

Veuillez noter que les commentaires doivent être approuvés avant d'être publiés